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Consentement explicite requis pour un programme d’échange de liste de donateurs

Conclusions en vertu de la LPRPDE no 2021-009

Le 30 mars 2021


Plainte en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (la Loi)

Description

Un organisme caritatif comptait sur le consentement implicite pour inscrire des donateurs à un programme d’échange de liste de donateurs, dans le cadre duquel l’organisme partageait les coordonnées des donateurs avec d’autres organismes caritatifs. Après avoir appliqué les facteurs énoncés dans nos Lignes directrices pour l’obtention d’un consentement valable, nous avons déterminé que l’organisme caritatif devait obtenir un consentement explicite, étant donné qu’un tel partage d’information dépasse les attentes raisonnables des donateurs. Nous avons constaté que l’information fournie aux donateurs par l’organisme caritatif n’était pas suffisante pour favoriser un consentement valable.

À retenir :

  • Les organismes, lorsqu’ils ont à déterminer la forme de consentement requise, doivent tenir compte des attentes raisonnables de l’individu.
  • Ils doivent prendre en considération nos Lignes directrices pour l’obtention d’un consentement valable pour élaborer un processus d’obtention du consentement. Plus précisément, ils doivent s’assurer de préciser d’emblée les renseignements importants, par exemple, quels renseignements seront communiqués et à qui.

Rapport de conclusions

Aperçu

Le plaignant a affirmé qu’un organisme caritatif (« l’intimé ») n’a pas obtenu son consentement pour participer à un programme d’échange de liste de donateurs (« le programme »), ajoutant que la case à cocher de renonciation incluse dans le formulaire de don par courrier remis avec le don était inadéquate.

Le plaignant a été surpris d’apprendre qu’un autre organisme caritatif lui demandait des dons en utilisant une adresse fournie par l’intimé dans le cadre du programme. Le plaignant a ensuite examiné son dernier formulaire de don remis à l’intimé et a constaté qu’il y avait une case non cochée disant : « Je préfère que mon nom ne soit pas transmis à d’autres organismes » [Traduction]. Le plaignant a communiqué avec l’intimé, qui l’a retiré du programme.

Nous comprenons la valeur pour l’intimé et d’autres organismes caritatifs d’échanger des listes de donateurs et que l’intimé proposait une option de renonciation dans chaque formulaire de don; cependant, nous avons déterminé que cela ne constituait pas un consentement valable au titre de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE).

Dans le contexte de cette plainte, l’information partagée par l’organisme caritatif avec des tierces parties dans le cadre du programme n’était pas de nature sensible et le programme ne constitue pas un risque résiduel important de préjudice grave. Malgré cela, nous avons conclu qu’un tel partage d’information dépasse les attentes raisonnables des donateurs, de sorte que l’intimé était tenu d’obtenir le consentement explicite pour une telle pratique.

Nous avons également constaté que l’information fournie par l’intimé n’était pas suffisante pour favoriser un consentement valable. Le formulaire du donateur ne contenait pas de renseignements importants sur le programme qui auraient dû être fournis d’emblée, y compris quels renseignements personnels seraient divulgués, à qui ils seraient communiqués, et à quelle fin. Il manquait certains renseignements (notamment sur la façon dont les donateurs pouvaient retirer leur consentement au programme) nécessaires à l’établissement d’un consentement valable dans l’encart joint au formulaire, qui comprenait plus de détails sur le programme, ainsi que dans la politique de confidentialité de l’intimé. De surcroît, l’intimé n’a pas fourni uniformément l’encart aux donateurs réguliers, dont le plaignant.

Nous recommandons que l’intimé mette immédiatement en œuvre les mesures suivantes pour se conformer à la LPRPDE : (i) obtenir le consentement explicite aux fins du programme; (ii) fournir davantage de renseignements dans le formulaire de don, ainsi que dans l’encart et la politique de confidentialité, afin que le consentement devienne valable.

Plainte

  1. Le plaignant prétend que l’intimé a contrevenu à la LPRPDE en omettant d’obtenir son consentement à participer au programme d’échange de liste de donateurs. Plus précisément, il affirme que le consentement que l’intimé prétend avoir obtenu au moyen d’une case à cocher de renonciation dans le formulaire de don par courrier qu’il avait soumis avec son don était inadéquat.
  2. Le plaignant n’a pas soulevé de préoccupations liées à d’autres méthodes (p. ex. par téléphone, par Internet) par lesquelles l’intimé pourrait obtenir le consentement pour le programme. Par conséquent, la portée de cette plainte est limitée à la façon dont l’intimé cherche à obtenir le consentement dans ses formulaires envoyés par courrier, c.-à-d. le formulaire de don et l’encart connexe qui explique le programme de façon détaillée (l’encart). Ces conclusions devraient, toutefois, éclairer la manière dont l’intimé obtient le consentement pour le programme grâce à d’autres méthodes.

Contexte

  1. L’intimé est un organisme caritatif qui se décrit [information retirée par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (CPVP)].
  2. Le plaignant fait régulièrement des dons à l’intimé. En 2018, il a découvert l’existence du programme lorsqu’il a reçu un formulaire envoyé par courrier, dans lequel un autre organisme caritatif lui demandait des dons. Cet organisme caritatif a confirmé au plaignant que c’était l’intimé qui lui avait fourni son nom et ses coordonnées. Le plaignant était d’avis qu’il n’avait pas consenti à ce que l’intimé partage ses renseignements personnels avec des tierces parties, y compris cet organisme caritatif. Le plaignant a donc examiné son dernier formulaire de don remis à l’intimé et a constaté qu’il y avait une case à cocher disant : « Je préfère que mon nom ne soit pas transmis à d’autres organismes » [Traduction]. Il a expliqué que, même s’il avait reçu et renvoyé le formulaire de don à de multiples reprises, il n’avait jamais remarqué cette case à cocher auparavant.
  3. Le plaignant a communiqué avec l’intimé pour renoncer au programme et a déclaré qu’il s’opposait à ce que l’intimé utilise un mécanisme de renonciation pour le partage de ses renseignements personnels avec des tierces parties. Plus précisément, il a communiqué avec le dirigeant principal du développement de l’intimé. Puis, après être resté sans réponse pendant plusieurs semaines, il a communiqué avec le président-directeur général et le président du conseil d’administration de l’intimé. En fin de compte, le plaignant a reçu une réponse de l’intimé environ trois mois après sa première correspondance. L’intimé s’est excusé de l’absence de réponse et a affirmé ne pas avoir répondu aux deux premières demandes de renseignements du plaignant en raison d’erreurs administratives.
  4. Insatisfait de la réponse obtenue, le plaignant a déposé une plainte auprès du Commissariat.

Analyse

Enjeu : L’intimé obtenait-il un consentement valable pour le programme?

Déclaration de l’intimé
  1. L’intimé a déclaré qu’il avait obtenu le consentement du plaignant pour partager ses renseignements personnels par l’intermédiaire du programme, d’après les formulaires de don fournis précédemment par le plaignant.
  2. Plus précisément, l’intimé a fourni les renseignements suivants :
    1. le programme est un important moyen permettant à l’intimé et à des organismes caritatifs semblables de trouver de nouveaux donateurs potentiels et ainsi d’obtenir le financement nécessaire à l’atteinte de leurs objectifs;
    2. l’échange de listes de donateurs ou de bailleurs de fonds, comme celui effectué dans le cadre du programme, est une pratique très utilisée depuis longtemps par des organismes caritatifs;
    3. conformément au programme, l’intimé ne divulgue aux autres organismes participants que le nom et l’adresse postale des donateurs, ainsi que le fait qu’ils ont fait un don à l’intimé. L’intimé partage cette information dans le seul but de permettre à ces organismes de communiquer avec les individus par courrier à une seule reprise pour demander des dons;Note de bas de page 1
    4. la participation au programme est volontaire. Le consentement est obtenu au moyen du formulaire de don;
    5. le formulaire de don est un document court qui comprend cinq cases à cocher, dont l’une indiquant ce qui suit : « Veuillez lire notre politique concernant l’échange de liste dans l’encart ci-joint. [_] Je préfère que mon nom ne soit pas transmis à d’autres organismes » [Traduction];
    6. l’intimé envoie un encart avec le formulaire de don aux donateurs nouveaux ou potentiels. Cet encart fournit plus de détails sur le programme : « Une importante façon pour nous de trouver des donateurs qui appuient notre œuvre humanitaire consiste à emprunter la liste de donateurs d’autres organismes caritatifs. Ceux-ci peuvent ensuite utiliser nos listes pour trouver des personnes appuyant leur cause. Il s’agit d’un moyen sans frais et économique de mieux faire connaître notre cause. Si vous souhaitez que votre nom soit retiré de la liste d’échange, il suffit de cocher la case appropriée sur le formulaire de réponse. Avant de le faire, cependant, veuillez garder à l’esprit à quel point ces échanges de listes sont importants pour recueillir des fonds qui nous permettent de poursuivre notre mission » [Traduction].
    7. Il est tenu pour acquis qu’un individu qui envoie par courrier le formulaire de don rempli sans avoir coché la case de renonciation au programme a consenti à participer au programme;
    8. les individus peuvent renoncer au programme en tout temps, y compris lorsqu’ils soumettent le formulaire de don ou par la suite, en communiquant avec l’intimé par téléphone ou courriel.
  3. En ce qui concerne la demande du plaignant de renoncer au programme, l’intimé a confirmé qu’il l’avait notée dans ses dossiers, qu’il avait retiré le plaignant de ses listes de partage de renseignements sur les donateurs et modifié son profil. Par la suite, le plaignant a soumis au Commissariat une copie de son formulaire de don personnalisé envoyé par courrier, qui tenait compte de son souhait de ne plus participer au programme (c.-à-d. que la case de renonciation avait été préalablement cochée; voir paragraphe 24, figure 2).
Forme de consentement
  1. Les Lignes directrices pour l’obtention d’un consentement valable (« les lignes directrices ») du CPVP prévoient que les organismes doivent généralement obtenir un consentement explicite lorsque : (i) les renseignements en question sont de nature sensible; (ii) la collecte, l’utilisation ou la communication de l’information ne répondent pas aux attentes raisonnables de l’intéressé; ou (iii) cela crée un risque résiduel important de préjudice grave. Il est aussi pertinent de tenir compte de ces facteurs pour déterminer si les renseignements utilisés par l’intimé pour obtenir le consentement étaient suffisamment clairs et évidents pour appuyer la forme de consentement requise.
  2. En fin de compte, comme mentionné ci-dessous, nous estimons que même si les renseignements divulgués dans ces circonstances par le programme ne sont pas de nature sensible et n’entraînent pas un risque important de préjudice résiduel, l’individu ne s’attendrait pas raisonnablement à leur divulgation, de sorte que l’intimé aurait dû obtenir un consentement explicite pour une telle pratique.
Utilisation des cases à cocher pour obtenir le consentement
  1. Le principe 4.3.7 de la LPRPDE prévoit que le consentement peut revêtir différentes formes. Par exemple : b) on peut prévoir une case où la personne pourra indiquer en cochant qu’elle refuse que ses nom et adresse soient communiqués à d’autres organisations. Si la personne ne coche pas la case, il sera présumé qu’elle consent à ce que les renseignements soient communiqués à des tiers.
  2. Par conséquent, nous constatons que les cases à cocher constituent dans certaines circonstances une méthode raisonnable d’obtenir le consentement. Il faut toutefois établir si le désistement est approprié dans les circonstances de l’affaire.
Nature sensible
  1. Selon le principe 4.3.6 de la LPRPDE, la façon dont un organisme obtient le consentement peut varier selon les circonstances et la nature des renseignements recueillis. En règle générale, l’organisme devrait chercher à obtenir un consentement explicite s’il est considéré que les renseignements peuvent être de nature sensible. Lorsque les renseignements sont moins délicats, un consentement implicite serait normalement jugé suffisant.
  2. La sensibilité des renseignements personnels dépend du contexte. Le principe 4.3.4 prévoit que la forme du consentement que l’organisation cherche à obtenir peut varier selon les circonstances et la nature des renseignements. Pour déterminer la forme de consentement à utiliser, les organisations doivent tenir compte du caractère sensible des renseignements en question. Si certains renseignements (p. ex. dossiers médicaux et d’impôts) sont presque toujours considérés comme de nature sensible, tout renseignement peut être sensible selon le contexte. Ainsi, en règle générale, le nom et l’adresse des abonnés à un magazine d’actualités ne seraient pas considérés comme des renseignements sensibles. Cependant, le nom et l’adresse des abonnés à certains magazines d’intérêt spécial pourraient constituer des renseignements sensibles.
  3. Nous déterminons donc si le nom et l’adresse du donateur étaient des renseignements sensibles lorsqu’ils étaient combinés avec les renseignements selon lesquels ils avaient fait un don à l’intimé. Le fait qu’une personne a fait un don à un organisme sans but lucratif en particulier peut être un renseignement sensible puisque, d’après la nature de l’organisation, il serait possible de déduire des renseignements personnels sensibles à propos du donateur.
  4. Nous constatons à cet égard que certains organismes caritatifs et sans but lucratif peuvent représenter des intérêts particuliers ou appuyer certains groupes marginalisés (p. ex. personnes ayant des problèmes de santé bien précis, certaines croyances religieuses ou une orientation sexuelle particulière). En revanche, d'autres organisations caritatives ont des mandats plus généraux, et le fait de savoir qu'une personne a fait un don pour soutenir une telle organisation ne permettra probablement pas de tirer des conclusions qui représentent des informations sensibles sur le donateur.
  5. Le fait que le plaignant a fait un don à l’intimé ne révèle pas, à notre avis, de renseignements de nature sensibles à son sujet. Nous jugeons par conséquent que les renseignements divulgués aux fins du programme ne sont pas sensibles dans ce contexte.
  6. Toutefois, compte tenu de l’affirmation de l’intimé selon laquelle le partage de listes de donateurs est une pratique courante au sein des organismes caritatifs, nous soulignons que les renseignements personnels échangés peuvent être de nature sensible, dans le contexte particulier d’autres organismes sans but lucratif ou d’autres causes.
Attentes raisonnables
  1. Selon le principe 4.3.5 de la LPRPDE : « Dans l’obtention du consentement, les attentes raisonnables de la personne sont aussi pertinentes. Par exemple, une personne qui s’abonne à un périodique devrait raisonnablement s’attendre à ce que l’entreprise, en plus de se servir de son nom et de son adresse à des fins de postage et de facturation, communique avec elle pour lui demander si elle désire que son abonnement soit renouvelé. Dans ce cas, l’organisation peut présumer que la demande de la personne constitue un consentement à ces fins précises. D’un autre côté, il n’est pas raisonnable qu’une personne s’attende à ce que les renseignements personnels qu’elle fournit à un professionnel de la santé soient donnés sans son consentement à une entreprise qui vend des produits de soins de santé. »
  2. Pour les motifs ci-dessous, nous avons conclu que le programme d’échange de liste de donateurs ne fait pas partie des attentes raisonnables de l’individu.
  3. Le plaignant a déclaré que, en tant que donateur, il s’attendait à ce que l’intimé utilise ses renseignements personnels aux fins du traitement de ses dons. Il ne s’attendait pas à ce que l’intimé partage ses renseignements personnels avec d’autres organismes sans but lucratif aux fins propres à ces organismes. Cependant, les attentes subjectives du plaignant ne sont pas déterminantes pour ce qui est de la question de la notion générale des attentes raisonnables d’un individu.
  4. Selon les lignes directrices : « en cas d’utilisation ou de communication à laquelle l’utilisateur ne s’attendrait pas raisonnablement — entre autres la communication de certains renseignements à un tiers […], un consentement explicite serait probablement exigé. Dans certains cas, d’autres facteurs contextuels peuvent entrer en jeu. Par exemple, lorsqu’une organisation envisage de communiquer des renseignements à un tiers, l’identité de ce dernier et les fins auxquelles il souhaite obtenir l’information peuvent être pertinentes. »
  5. L’intimé a affirmé qu’il convient de tenir compte de l’ubiquité de l’échange de listes de donateurs dans le domaine des organismes sans but lucratif, de la divulgation et de l’utilisation limitées des renseignements sur les donateurs, ainsi que des règles et des restrictions sur la fréquence des communications, pour ce qui est de déterminer les attentes raisonnables des donateurs et la forme appropriée de consentement dans ce cas.
  6. Nous reconnaissons que l’échange de listes de donateurs soit une pratique commerciale courante; cependant, nous n’acceptons pas que cela soit déterminant des attentes raisonnables quant à la façon et au moment où un organisme peut divulguer des renseignements personnels avec des tierces parties.
  7. Nous considérons que l’utilisation, par l’intimé, des renseignements personnels indiqués dans un formulaire de don aux fins de traitement du don ou d’envoi d’un reçu à des fins fiscales concorderait avec les attentes raisonnables de l’individu. Cependant, nous soulignons que cela n’était pas l’objet de la divulgation du nom et de l’adresse de l’individu par l’intermédiaire du programme. Celle-ci visait plutôt la fin secondaire soit de permettre à des tierces parties de demander des dons à l’individu en question. Nous estimons que les individus ne s’attendraient raisonnablement pas à ce que l’intimé divulgue leurs renseignements personnels à des tierces parties à cette fin. En particulier, les individus pour lesquels faire des dons caritatifs est une question privée (p. ex. pour des motifs religieux) ne s’attendraient pas à ce que leurs renseignements personnels soient ainsi divulgués.
Risque résiduel important de préjudice grave
  1. Selon les lignes directrices : « Le risque de préjudice pour l’intéressé est à la base de l’analyse contextuelle de la sensibilité des renseignements et des attentes raisonnables. Le terme “préjudice” devrait être interprété dans son sens large; il peut s’agir, entre autres, de dommages matériels, d’une atteinte à la réputation ou d’une restriction de l’autonomie. »
  2. Nous constatons que, dans les circonstances du programme, la divulgation potentielle des renseignements personnels est très limitée, à la fois dans sa nature et son contexte, c.-à-d. :
    1. nom du donateur, adresse postale et fait que la personne a fait un don à l’intimé (renseignements considérés comme n’étant pas de nature sensible dans ce contexte);
    2. échange avec d’autres organismes sans but lucratif participants;
    3. dans le but de permettre à ces organismes de communiquer avec la personne une fois par courrier pour demander des dons.
  3. Nous constatons en outre que, si un donateur reçoit une demande de don non désirée par courrier dans le cadre du programme, il peut renoncer à celui-ci, de sorte qu’il ne recevra plus de telles demandes à l’avenir.
  4. À la lumière de ce qui précède, nous considérons que la divulgation des renseignements personnels du plaignant aux fins du programme ne constituait pas un risque important de préjudice grave.
  5. De plus, compte tenu de l’analyse ci-dessus, l’intimé ne pouvait pas se fier sur un consentement implicite et devait obtenir un consentement explicite pour le programme, même si les renseignements en question n’étaient pas sensibles dans ce contexte, puisque les donateurs ne s’attendraient pas raisonnablement à une telle divulgation.
Consentement valable
  1. Selon le principe 4.3 de l’Annexe 1 de la LPRPDE : « Toute personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu’il ne soit pas approprié de le faire. »
  2. Selon le principe 4.3.2 : « Les organisations doivent faire un effort raisonnable pour s’assurer que la personne est informée des fins auxquelles les renseignements seront utilisés. Pour que le consentement soit valable, les fins doivent être énoncées de façon que la personne puisse raisonnablement comprendre de quelle manière les renseignements seront utilisés ou communiqués. »
  3. De plus, selon l’article 6.1 de la LPRPDE : « Pour l’application de l’article 4.3 de l’annexe 1, le consentement de l’intéressé n’est valable que s’il est raisonnable de s’attendre à ce qu’un individu visé par les activités de l’organisation comprenne la nature, les fins et les conséquences de la collecte, de l’utilisation ou de la communication des renseignements personnels auxquelles il a consenti. »
  4. Premièrement, nous avons examiné l’encart, qui constituait la communication la plus détaillée aux donateurs à propos du programme. Nous sommes d’avis que, même si l’encart décrivait adéquatement le programme, il n’expliquait pas que l’adresse postale d’un donateur participant ou le fait qu’il avait fait un don seraient communiqués à des tierces parties. Nous estimons que cette information est essentielle pour comprendre la nature du programme, de sorte que la description était inadéquate à cet égard.
  5. Nous avons aussi souligné que, même si l’intimé avait toujours envoyé l’encart avec le formulaire de don à des donateurs nouveaux ou potentiels, il se peut que des donateurs réguliers aient reçu le formulaire sans l’encart. Dans le contexte de cette plainte, dans le dernier envoi de l’intimé, le plaignant n’avait reçu que le formulaire de don. Dans tous les cas, même lorsqu’un donateur recevait l’encart, rien ne garantissait qu’il ait lu le document à l’appui.
  6. Les lignes directrices reconnaissent qu’il se peut que certains utilisateurs ne lisent pas l’ensemble des communications sur la confidentialité. Elles prévoient donc que, pour obtenir un consentement valable, les organisations doivent faire en sorte que les individus puissent se familiariser rapidement avec les éléments clés ayant une incidence sur leur décision, dès qu’ils envisagent d’utiliser ou non le produit ou service offert, d’effectuer un achat, de télécharger une application, etc. À cette fin, les organisations doivent généralement mettre l’accent sur certains éléments clés, dont les suivants : (i) quels sont les renseignements personnels recueillis; (ii) à qui seront-ils divulgués; (iii) à quelles fins.
  7. À titre d’exemple, vous trouverez ci-dessous une copie censurée de deux versions du formulaire de don en question. La figure 1 représente le formulaire soumis par le plaignant dans le cadre de la plainte. La figure 2 contient les modifications apportées par l’intimé au formulaire durant notre enquête, notamment en ce qui concerne l’augmentation de la taille de la police pour l’option de renonciation :

    Figure 1 :

    [Censurée par le CPVP]

    Figure 2 :

    [Censurée par le CPVP]

  8. Nous reconnaissons que le texte de renonciation est plus en évidence dans le second formulaire; toutefois, les deux versions ont omis de fournir d’emblée certains éléments d’information clés. Plus précisément, l’énoncé « Veuillez lire notre politique concernant l’échange de liste dans l’encart ci-joint. [_] Je préfère que mon nom ne soit pas transmis à d’autres organismes » [Traduction] n’explique pas que le nom du donateur, son adresse postale et le fait qu’il avait fait un don à l’intimé seraient divulgués : (i) à des organismes sans but lucratif; (ii) afin que ces organismes puissent demander des dons au donateur. Par conséquent, selon nous, cela n’était pas suffisant pour constituer un consentement valable.
  9. Nous soulignons en outre que les donateurs peuvent aussi consulter la politique de confidentialité de l’intimé pour se renseigner sur les pratiques de l’intimé en la matière, y compris celles liées au programme, particulièrement s’ils cherchent de tels renseignements lorsqu’ils n’ont pas à leur disposition une copie du formulaire de don ou de l’encart. Nous avons examiné la politique de confidentialité de l’intimé et jugé qu’elle décrit le programme brièvement, en fournissant bien moins de détails que l’encart.
  10. Enfin, les lignes directrices prévoient que les choix des individus en matière de confidentialité doivent être expliqués clairement et être facilement accessibles. Nous comprenons qu’un donateur de l’intimé inclus dans le programme a la possibilité de retirer son consentement à une date ultérieure sans avoir à soumettre un formulaire de don, auquel ils peuvent ne pas avoir accès au moment opportun. Cependant, nous avons constaté que ni l’encart ni la politique de confidentialité ne fournissent les coordonnées permettant à un donateur de retirer son consentement.
  11. Pour ces motifs, nous sommes d’avis que l’intimé n’a pas obtenu un consentement valable pour la divulgation, par l’intermédiaire du programme, de renseignements sur les donateurs à des organismes sans but lucratif.
Recommandations
  1. Nous avons fait les recommandations suivantes à l’intimé afin que l’organisme soit conforme à la LPRPDE :
    1. mettre en œuvre des mesures afin d’obtenir le consentement explicite aux fins du programme;
    2. modifier les communications sur la confidentialité pour garantir l’obtention d’un consentement valable pour le programme :
      1. fournir d’emblée des renseignements clés sur le formulaire de don, en précisant notamment ce qui suit si le consentement explicite est donné : (i) le nom du donateur, son adresse postale et le don qu’il a fait seront divulgués; (ii) ces renseignements seront communiqués à des organismes sans but lucratif; (iii) la divulgation vise à permettre aux organismes bénéficiaires de demandeur des dons au donateur; (iv) les donateurs ont l’option de retirer en tout temps leur consentement;
      2. joindre l’encart à tous les formulaires de don, y compris ceux envoyés à des donateurs réguliers (l’intimé s’est déjà engagé à le faire durant l’enquête), et expliquer dans l’encart que l’intimé divulguera le don que le donateur a fait à l’intimé, en plus de fournir d’autres détails, dont les coordonnées nécessaires, sur la façon de retirer son consentement au programme;
      3. inclure dans la politique de confidentialité de l’intimé des explications plus détaillées sur le programme et la façon de retirer le consentement.
Réponse de l’intimé aux recommandations
  1. L’intimé consent à mettre en œuvre toutes les recommandations du Commissariat.
  2. L’intimé a expliqué que la mise en œuvre des recommandations nécessiterait d’importants changements à ses mécanismes de collecte de fonds, à ses communications et à ses processus qui font actuellement référence au programme et appuient celui-ci. L’organisme a aussi déclaré que [censuré par le CPVP], les ressources sont limitées dans l’ensemble de l’organisme. En fin de compte, l’intimé s’est engagé à mettre en œuvre les recommandations d’ici au 30 avril 2022, ce que le Commissariat a accepté.

Conclusion

  1. Par conséquent, le Commissariat conclut que la plainte est fondée et conditionnellement résolue.
  2. Nous nous attendons à ce que l’intimé présente au Commissariat : (i) d’ici au 30 avril 2021, un plan détaillé de mise en œuvre des recommandations, incluant les étapes et les échéanciers connexes; (ii) d’ici au 31 juillet, au 31 octobre 2021 et au 31 janvier 2022 des rapports trimestriels décrivant les progrès réalisés en vue de la mise en œuvre des étapes décrites dans le plan; (iii) d’ici au 30 avril 2022 un rapport final avec documents à l’appui démontrant que les recommandations ont été pleinement mises en œuvre. Nous déciderons alors de la meilleure approche pour donner suite à cette affaire, le cas échéant, en conformité avec les pouvoirs que nous confère la Loi.

Mise à jour

Depuis que nous avons émis nos conclusions dans ce dossier, l’intimé a avisé le Commissariat que l’organisme avait mis fin à sa participation dans le programme d’échange de liste de donateurs.

Date de modification :