Une personne conteste l’exactitude de sa cote de solvabilité en temps réel
Rapport des conclusions en vertu de la LPRPDE no 2013-008
Le 21 août 2013
Une personne a contesté la façon dont une agence d’évaluation du crédit avait calculé sa cote de solvabilité. Le problème concernait la façon dont l’agence avait utilisé un montant d’une dette sanctionnée par une décision de justice. Dans cette décision, la personne avait été considérée comme débitrice d’une somme importante. Selon la plaignante, sa cote de solvabilité avait été injustement modifiée à la baisse du fait que l’information associée à la décision ne reflétait pas le solde réel de la dette en souffrance. À son avis, cette inexactitude l’empêchait d’obtenir du crédit. Elle a donc demandé à l’agence d’évaluation du crédit de mettre à jour cette information et de recalculer de manière rétroactive sa cote de solvabilité. Elle a aussi fait valoir que les deux déclarations de consommateur qu’elle avait présentées par écrit n’avaient pas été versées à son dossier de crédit alors qu’elles renfermaient des renseignements rectificatifs importants concernant la créance judiciaire. L’agence a répondu qu’il ne lui serait pas possible de recalculer rétroactivement la cote de solvabilité puisque cette cote est le résultat d’un calcul continu en temps réel reposant sur l’activité en cours dans le dossier de crédit du consommateur.
L’agence a également expliqué qu’elle ne disposait d’aucune source fiable pour mettre à jour régulièrement l’information sur les paiements et le solde dû relativement aux créances judiciaires antérieures. Par exemple, le greffe du tribunal – source d’information de l’agence concernant les décisions – ne fait pas état de cette information. Par ailleurs, l’agence a expliqué que seul le nombre total de décisions de justice figurant au dossier – et non le montant précisé dans une décision de justice – peut influer sur le calcul de la cote de solvabilité. Enfin, l’agence a reconnu qu’elle avait omis d’informer la plaignante qu’elle n’avait pu inclure dans son dossier les déclarations présentées car celles-ci étaient trop longues. Dans ses conclusions, la commissaire adjointe à la protection de la vie privée a convenu qu’il n’était pas possible pour l’agence de faire état avec exactitude de l’information à jour sur les paiements et le solde dans le dossier de crédit de la plaignante en raison de l’absence apparente de sources fiables. En outre, comme cette information n’avait pas été utilisée pour calculer la cote de solvabilité de la plaignante, il n’était pas nécessaire de recalculer rétroactivement sa cote. Elle a également reconnu que l’espace prévu pour les déclarations de consommateur était limité, mais elle a fait observer que l’agence d’évaluation du crédit aurait dû informer la plaignante que ses déclarations étaient trop longues pour être versées au dossier. En pareil cas, la plaignante aurait eu la possibilité de modifier ses déclarations et de les présenter nouveau en vertu du principe 4.9.5. La commissaire adjointe à la protection de la vie privée a donc déterminé que la plainte concernant la modification des renseignements personnels par l’ajout des déclarations de consommateur était fondée et résolue. Les autres questions soulevées dans la plainte ont été jugées non fondées.
Leçons apprises
- Les organisations doivent tenir à jour les renseignements personnels de façon à ce qu’ils soient aussi exacts et complets que l’exigent les fins auxquelles ils sont destinés.
- Les organisations doivent apporter les modifications nécessaires aux renseignements personnels concernant une personne quand celle-ci arrive à démontrer que les renseignements sont inexacts ou incomplets.
- Selon la nature des renseignements personnels qui font l’objet de la contestation, l’organisation doit corriger, supprimer ou ajouter des renseignements.
Rapport de conclusions
Plainte en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (la Loi ou la LPRPDE)
- La plaignante allègue qu’une agence d’évaluation du crédit (la mise en cause ou l’agence) aurait omis d’apporter des modifications aux renseignements personnels figurant dans son dossier de crédit, plus précisément à l’information sur une décision de justice concernant un emprunt bancaire et une forclusion.
Résumé de l’enquête
Décision du tribunal
- La plaignante était administratrice et actionnaire d’une société à responsabilité limitée participant à la construction et à la vente d’un projet immobilier. L’entreprise de la plaignante avait obtenu un prêt auprès de la banque pour financer le projet. La plaignante avait donné une garantie personnelle sur le prêt.
- Par la suite, la banque a demandé le remboursement du prêt et a amorcé la procédure de forclusion. En fin de compte, le tribunal a rendu un jugement en faveur de la banque dans lequel il désignait la plaignante comme débitrice.
- La plaignante a ensuite remarqué que la créance judiciaire, d’un montant très élevé, apparaissait dans son rapport de crédit, alors qu’elle avait effectué des paiements en vue de réduire considérablement ce montant.
- La plaignante a fait valoir que son dossier de crédit aurait dû faire état de ces paiements ainsi que du nouveau solde. Comme cela n’était le cas, elle estimait que sa cote de solvabilité avait été injustement abaissée au point qu’il lui était désormais impossible d’obtenir du financement pour rembourser la dette restante.
Demandes de modifications de la plaignante
- La plaignante a adressé les trois demandes suivantes à la mise en cause :
- Mettre à jour son dossier de crédit en utilisant l’information sur les paiements et en indiquant le nouveau solde de la créance judiciaire;
- Recalculer rétroactivement sa cote de solvabilité;
- Verser deux déclarations de consommateur (rédigées par la plaignante) à son dossier de crédit afin de rectifier l’information qu’il renfermeNote de bas de page 1.
- La plaignante a affirmé que la mise en cause n’avait pas donné suite à ses demandes. Par conséquent, elle a déposé une plainte auprès du Commissariat, qui l’a acceptée.
Position de la mise en cause
- Dans ses déclarations au Commissariat, la mise en cause a indiqué qu’elle récupérait et affichait l’information sur les décisions de justice pour que le profil demeure aussi exact que possible aux fins des rapports de solvabilité. Elle a affirmé qu’en l’absence de cette information, les renseignements sur le crédit associés à un individu pourraient être inexacts et ne pas donner un portrait complet de l’intéressé à ses clients.
- La mise en cause a ensuite parlé des trois demandes faites par la plaignante (voir ci-dessus) :
- En ce qui concerne la demande d’utilisation de l’information sur les paiements et le solde de la créance judiciaire de la plaignante, la mise en cause a expliqué qu’il n’était pas facile, au Canada, d’obtenir des données aussi détaillées auprès du greffe du tribunal ̶ qui est la source d’information de la mise en cause pour ce genre de renseignements. Lorsqu’un jugement a été exécuté, la mise en cause l’indique, mais elle ne dispose pas d’information fiable indiquant le solde d’une dette ou les paiements qui ont été effectués avant cela.
- Pour ce qui est du calcul de la cote de solvabilité, la mise en cause a expliqué qu’il était impossible de recalculer de manière rétroactive une cote : « comme les dossiers de crédit peuvent être mis à jour quotidiennement, la cote est sans cesse recalculée (c’est-à-dire calculée en temps réel). En d’autres termes, tout dépendant de l’activité dans le dossier de crédit du consommateur, une cote de solvabilité établie il y a 30 jours n’est probablement pas la même que celle d’aujourd’hui ».
- En ce qui a trait au non-versement des déclarations de consommateur de la plaignante à son dossier de crédit, la mise en cause a indiqué que le nombre total de caractères de ces déclarations dépassait le maximum autorisé. Le Commissariat a vérifié la véracité de l’explication et le calcul de la mise en cause, selon l’information sur la limite maximale que l’on peut consulter sur le site Web de la mise en causeNote de bas de page 2.
La mise en cause a ajouté que son service de relations avec la clientèle aurait dû suivre la procédure interne qui oblige les représentants des relations avec la clientèle à envoyer une lettre au consommateur lui demandant de faire parvenir une nouvelle déclaration plus courte (soit un texte d’environ quatre lignes). Par suite de cette plainte, la mise en cause s’est penchée sur la question et a constaté que son représentant n’avait pas respecté la procédure.
- La mise en cause a précisé qu’en ce qui concerne la façon dont elle calcule les cotes de solvabilité, le nombre de décisions de justice prises à l’encontre d’une personne peut influer sur sa cote, mais que le montant de la créance judiciaire ou le montant dû n’est pas pris en compte dans l’algorithme utilisé pour déterminer la cote.
- Au cours de notre enquête, nous avons appris qu’en vertu de la loi sur la protection du consommateur en vigueur dans la province de résidence de la plaignante, six ans après qu’un jugement a été rendu, les agences d’évaluation du crédit doivent cesser d’inclure dans leurs rapports sur le crédit d’une personne de l’information sur ce jugement, à moins que le créancier judiciaire (ou son représentant) ne confirme que la créance judiciaire demeure impayée en tout ou en partie et que cette confirmation n’apparaisse dans le dossier de crédit.
Somme payée en vertu d’un jugement
- Pendant notre enquête, la plaignante a payé intégralement la créance judiciaire. Elle a confirmé que la mise en cause avait mis à jour son dossier de crédit comme il se doit pour indiquer que le jugement avait été exécuté.
Application
- Pour rendre nos décisions, nous avons appliqué les principes 4.6 et 4.9.5 de la partie 1 de la Loi.
- Selon le principe 4.6, les renseignements personnels doivent être aussi exacts, complets et à jour que l’exigent les fins auxquelles ils sont destinés.
- Selon le principe 4.9.5, lorsqu’une personne démontre que des renseignements personnels sont inexacts ou incomplets, l’organisation doit apporter les modifications nécessaires à ces renseignements. Selon la nature des renseignements qui font l’objet de la contestation, l’organisation doit corriger, supprimer ou ajouter des renseignements. S’il y a lieu, l’information modifiée doit être communiquée à des tiers ayant accès à l’information en question.
Constatations
- Le premier point à examiner (voir le point [i] au paragraphe 6) est l’allégation selon laquelle la mise en cause, en vertu des principes 4.6 et 4.9.5, aurait dû inclure dans le dossier de crédit de la plaignante des précisions sur les paiements effectués en vertu d’une décision de justice avant que la créance ne soit remboursée. La plaignante a fait valoir qu’en l’absence de cette information, sa cote de solvabilité avait été injustement abaissée.
- Notre enquête a établi que l’information sur l’historique des paiements ne figurait pas dans le dossier de crédit de la plaignante, comme celle-ci l’avait indiqué. La mise en cause a plutôt décidé délibérément de faire état de la décision de justice ainsi que de la valeur monétaire de la créance judiciaire.
- Selon les preuves dont nous disposons, nous sommes convaincus que l’information sur les paiements et le solde dû ne peut être obtenue auprès du greffe auquel s’adresse la mise en cause pour obtenir son information concernant les décisions de justice; il ne semble pas non plus exister d’autres sources fiables auprès desquelles obtenir cette information. À notre avis, il n’était donc pas possible pour la mise en cause de rendre compte de cette information avec exactitude dans le dossier de crédit de la plaignante. Même si la mise en cause avait mis à jour le dossier de crédit de la plaignante en indiquant le solde courant de la créance à la lumière de l’information fournie par cette dernière, elle n’aurait pas pu garantir l’exactitude de cette information au fil du temps.
- De plus, la mise en cause a précisé que c’est le nombre de décisions de justice qui peut influer sur la façon dont elle calcule la cote de solvabilité d’une personne, et non le montant de chaque créance judiciaire ou le solde restant de cette créance. Par conséquent, l’absence d’information sur les paiements et le solde dû n’a pas influé sur la cote de solvabilité de la plaignante comme celle-ci l’affirmait.
- C’est pourquoi nous sommes convaincus que la mise en cause s’est acquittée de ses obligations en vertu des principes 4.6 et 4.9.5 relativement au premier point.
- Le deuxième point (voir le point [ii] au paragraphe 6) concerne l’allégation de la plaignante selon laquelle la mise en cause, en vertu du principe 4.9.5, aurait dû recalculer rétroactivement sa cote de solvabilité et, ce faisant, prendre en compte ce que la plaignante qualifiait d’information incomplète dans son dossier.
- Comme nous avons constaté que la mise en cause n’était pas tenue d’inclure l’information sur les paiements et le solde dû, et que, de toute façon, cette information n’avait pas été utilisée pour calculer la cote de solvabilité de la plaignante, la mise en cause n’était donc pas obligée de refaire le calcul. De plus, nous acceptons la position de la mise en cause selon laquelle elle ne peut recalculer rétroactivement une cote de solvabilité puisque cette cote est calculée en temps réel – en d’autres termes, il s’agit d’un instantané reposant sur des renseignements précis disponibles à un moment donné.
- Nous sommes donc d’avis que le deuxième point n’est pas fondé en vertu du principe 4.9.5 de la Loi.
- Enfin, le troisième point (voir le point [iii] au paragraphe 6) concerne l’allégation selon laquelle la mise en cause aurait dû verser les déclarations de consommateur de la plaignante à son dossier de crédit, en vertu du principe 4.9.5.
- Les déclarations de consommateur renfermaient de l’information complémentaire rectifiant certains renseignements figurant au dossier de crédit de la plaignante, mais elles dépassaient la limite préétablie quant au nombre de caractères.
- La législation provinciale pertinente en matière de protection du consommateur stipule qu’une personne peut donner à une agence d’évaluation une explication ou de l’information complémentaire qui se rapporte à l’information conservée par cette dernière à son sujet. Nous reconnaissons à cet égard que le dossier de crédit de la plaignante était incomplet en l’absence de l’information complémentaire figurant dans les déclarations de consommateur soumises.
- Nous reconnaissons également le point de vue de la mise en cause qui, pour des raisons d’espace, peut refuser de verser au dossier de crédit les déclarations de consommateur (servant à expliquer ou à rectifier l’information au dossier) qui dépassent une certaine longueur. La mise en cause explique cette limite de caractères sur son site Web. Par ailleurs, nous avons noté que la législation provinciale pertinente en matière de protection du consommateur établit une limite comparable (100 mots).
- Toutefois, nous soulignons l’importance d’une procédure standard pour informer les intéressés du fait que leurs déclarations doivent être révisées et renvoyées à la mise en cause en raison, par exemple, d’une longueur excessive. Malheureusement, même si cette procédure est en place chez la mise en cause, il semble, dans le cas qui nous occupe, qu’il y a eu une erreur ou un oubli. Par conséquent, la plaignante n’a pas été informée du nombre maximal de caractères et n’a pas pu fournir à la mise en cause de l’information complémentaire ni modifier la longueur de ses déclarations.
- Par conséquent, pour les raisons susmentionnées, la mise en cause a enfreint le principe 4.9.5 relativement au troisième point.
- Nous constatons que, pendant l’enquête, la mise en cause a offert de verser au dossier une déclaration de consommateur, d’une longueur acceptable, rédigée par la plaignante. Dans les circonstances, la plaignante a refusé de fournir la déclaration.
Conclusion
- Par conséquent, nous concluons que la question relative à la modification des renseignements personnels par l’ajout de déclarations de consommateur est fondée et résolue. Les autres questions soulevées dans la plainte ne sont pas fondées.
Autres
- En mai 2013, le Commissariat a publié un bulletin d’interprétation sur l’exactitudeNote de bas de page 3. Ce bulletin, qui est un nouveau document d’orientation s’adressant aux organismes des secteurs privé et public, offre de l’information et des lignes directrices pour comprendre comment le Commissariat interprète et applique le principe d’exactitude (principe 4.6).
- Les parties à la présente plainte jugeront peut-être utile de consulter ce bulletin pour mieux comprendre notre interprétation et notre application du principe d’exactitude.
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