Les renseignements du domaine public portant sur la faillite d’une personne ne peuvent être communiqués aux fins du recouvrement d’une créance sans son consentement
Résumé de conclusions d’enquête en vertu de la LPRPDE no 2009-020
[Principe 4.3, alinéas 7(3)b), 7(3)h.1) et 1c) du Règlement]
Leçons apprises
- Les organisations doivent faire preuve de prudence lorsqu’elles communiquent des renseignements sur des personnes dans le cadre du recouvrement d’une créance.
- L’alinéa 7(3)b) ne permet pas à une organisation de communiquer autant d’information qu’elle le veut en vue du recouvrement d’une créance. Tout renseignement personnel du débiteur communiqué sans son consentement doit être strictement limité à ce qui est nécessaire au processus de recouvrement de la créance.
- Lorsque les renseignements personnels figurant dans un registre public sont recueillis aux termes d’une autorisation législative (et pour lesquels un droit d’accès public est autorisé par la loi), la collecte, l’utilisation et la communication de ces renseignements sans le consentement de l’intéressé doivent être directement liées à la raison pour laquelle ils figurent au registre.
Une entreprise locale à laquelle la plaignante devait de l’argent a informé deux des membres de sa famille de sa situation financière et de sa faillite personnelle. La plaignante s’est opposée à ce que l’entreprise ait communiqué ces renseignements sans son consentement. L’entreprise croyait que son consentement n’était pas requis, en vertu d’une exception de la Loi portant sur les situations de recouvrement de créances. Elle croyait aussi que, puisque les renseignements sur la faillite étaient accessibles au public, son consentement n’était pas requis.
La commissaire adjointe a conclu que les exceptions ne s’appliquaient pas à ce cas.
Voici un résumé de l’enquête et des conclusions de la commissaire adjointe.
Résumé de l’enquête
Un salon funéraire local s’est occupé des arrangements funéraires lors de la mort du père de la plaignante. Il a été convenu qu’elle seule serait responsable des coûts associés aux funérailles.
Comme le compte de la plaignante était en souffrance, l’entreprise a tenté à plusieurs reprises de percevoir le montant dû. La plaignante a alors indiqué au salon funéraire qu’elle était sur le point de demander la protection contre la faillite. Le directeur du salon a téléphoné à la sœur de la plaignante, pour l’informer de sa faillite possible et de son compte en souffrance.
Lorsque le salon funéraire a reçu les documents traitant de la faillite du syndic en faillite, il a téléphoné une deuxième fois à la sœur de la plaignante, pour confirmer la faillite et pour savoir qui serait responsable de régler le compte en souffrance.
Plus tard, un employé du salon funéraire a eu une conversation téléphonique privée avec le frère de la plaignante dans le but de recouvrer la créance, et a discuté de la faillite de la plaignante et du compte en souffrance.
À la suite de cet appel, la plaignante a porté plainte au Commissariat. Elle était d’avis qu’en discutant de sa situation financière avec sa famille sans son consentement, le salon funéraire avait indûment communiqué ses renseignements personnels.
Le salon funéraire a affirmé que la communication des renseignements était permise en vertu de l’alinéa 7(3)b) de la Loi, qui précise que le consentement d’une personne relativement à la communication des renseignements personnels n’est pas requis dans le cadre du recouvrement d’une créance.
De plus, le salon funéraire a expliqué que les renseignements sur la faillite de la plaignante étaient déjà accessibles au public. Plus précisément, la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (Lois révisés du Canada (1985) chap. B-3) prévoit au paragraphe 11.1(1) qu’un registre public des faillites doit être conservé et que les renseignements y figurant doivent être fournis au public sur demande. Le salon funéraire avait reçu les documents traitant de la faillite de la plaignante directement du syndic en faillite, comme prévu par la loi. Par conséquent, le salon funéraire croyait que la plaignante n’aurait pas dû avoir d’attente relativement à la protection des renseignements personnels ayant trait à sa faillite.
Conclusions
Rendues le 10 décembre 2009
Application : Le principe 4.3 établit que toute personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu'il ne soit pas approprié de le faire. L’alinéa 7(3)b) précise que le consentement n’est pas requis dans le cadre du recouvrement d’une créance par une organisation. L’alinéa 7(3)h.1) précise qu’une organisation peut communiquer des renseignements personnels sans le consentement de l’intéressé si ces renseignements sont accessibles au public et qu’ils sont précisés dans le Règlement précisant les renseignements auxquels le public a accès. L’alinéa 1c) du Règlement précise les renseignements suivants pour l’application de l’alinéa 7(3)h.1) : les renseignements personnels qui figurent dans un registre, qui sont recueillis aux termes d’une autorisation législative et pour lesquels un droit d’accès public est autorisé par la loi, si la collecte, l’utilisation et la communication de ces renseignements sont directement liées à la raison pour laquelle ils figurent dans le registre.
Pour rendre sa décision, la commissaire adjointe s’est appuyée sur les considérations suivantes :
- Dans le résumé de conclusions d’enquête no 2004-282, la commissaire adjointe avait déjà examiné l’application de l’exception figurant à l’alinéa 7(3)b) : « […] Si elle reconnaît qu’une organisation peut communiquer les renseignements personnels d’un particulier sans le consentement de celui-ci dans le but de recouvrer une créance qu’elle a contre lui, cette exception ne donne pas […] à l’organisation "carte blanche" pour communiquer autant d’information qu’elle le veut dans le recouvrement d’une créance. »
- Le salon funéraire a communiqué aux membres de la famille de la plaignante des renseignements autres que ceux portant sur le compte en souffrance. Il a divulgué des renseignements sur la faillite imminente et ensuite sur la faillite réelle de l’intéressée à des personnes qui n’étaient pas responsables de la dette. La commissaire adjointe a donc conclu que, dans ce cas, le salon avait communiqué plus de renseignements que ceux prévus à l’alinéa 7(3)b). Ainsi, l’exception à l’obtention du consentement ne peut s’appliquer.
- La commissaire adjointe s’est ensuite penchée sur la pertinence du paragraphe 11.1(1) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (Lois révisés du Canada (1985) chap. B-3), puisque l’organisation avait affirmé qu’en vertu de cette loi, la faillite de la plaignante était déjà du domaine public.
- La commissaire adjointe a noté que l’exception de la Loi portant sur les renseignements accessibles au public (alinéa 1c) du Règlement lié à l’alinéa 7(3)h.1) précise que, pour être soustraite à l’exigence du consentement relativement au registre public, la communication des renseignements doit être faite pour une raison directement liée à la raison pour laquelle les renseignements figurent au registre. La loi sur la faillite vise entre autres à mettre en place un processus qui permet aux créanciers d’établir leurs réclamations et d’être payés. Le registre mis en place conformément à cette loi vise à consolider cet objectif.
- Dans le présent cas, la commissaire adjointe a constaté que les renseignements concernant la faillite de l’intéressée avaient été utilisés pour contourner le processus de paiement établi par la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. Par conséquent, les renseignements personnels de la plaignante avaient été communiqués à des membres de sa famille aux fins de recouvrement d’une créance, d’une façon autre que celles prévues par la Loi sur la faillite et l’insolvabilité.
- Comme la raison pour laquelle les renseignements avaient été communiqués n’était pas directement liée à la raison pour laquelle ils se trouvaient dans le registre, le salon funéraire ne peut valablement réclamer une exception au consentement en vertu de l’alinéa 1c) du Règlement lié à l’alinéa 7(3)h.1).
Conclusion
La commissaire adjointe a conclu que la plainte était fondée.
Voir également
Le résumé de conclusions d’enquête no 2004-282.
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