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Un expert en assurance prive un plaignant de son droit d’accéder à ses renseignements personnels

Résumé de conclusions d’enquête en vertu de la LPRPDE no 2008-397

[Principe 4.9; alinéa 9(3)a)]

Leçons apprises

  • Une organisation qui fait une revendication de privilège relatif à un litige en refusant une demande d'accès doit fournir au CPVP suffisamment de renseignements pour que ce dernier puisse confirmer la validité de la revendication.
  • Les experts en assurance ne sont pas exempts de répondre aux demandes d’accès à des renseignements personnels parce qu’ils représentent un assureur.

Un plaignant qui avait été impliqué dans un accident de la route a demandé d’avoir accès à ses renseignements personnels à un expert en assurance. Les services de cet expert avaient été retenues par l’assureur d’autres victimes de l’accident. On lui a refusé l’accès à ses renseignements personnels, et on lui demandé d’adresser sa demande à l’assureur. Le plaignant a finalement obtenu certains des renseignements personnels qui avaient été en la possession de l’expert par le biais de l’avocat représentant les autres parties et de l’expert; cependant, on a refusé de lui fournir certains renseignements en faisant valoir le privilège du secret professionnel liant l’avocat à son client.

Le Commissariat est intervenu et a demandé qu’on lui fournisse plus de précisions concernant les renseignements non communiqués, en particulier, en quoi ces renseignements répondaient aux critères du privilège du secret professionnel liant l’avocat à son client. Le représentant juridique de l’expert n’a pas fourni au Commissariat l’information demandée. Étant donné qu’on ne lui avait pas fourni suffisamment d’information pour prouver le fondement de la revendication de privilège, la commissaire adjointe a déterminé qu’elle n’était pas en mesure de conclure que le privilège avait été appliqué de façon adéquate. Par conséquent, le plaignant avait été privé de son droit d’accéder à ses renseignements personnels.

La section qui suit offre un aperçu de l’enquête et des conclusions de la commissaire adjointe.

Résumé de l’enquête

Le plaignant a été impliqué dans un accident de la route qui avait fait plusieurs victimes. Après l’accident, l’assureur d’une autre partie avait fait appel aux services d’un expert en assurance pour mener une enquête. Plusieurs mois plus tard, l’expert a été avisé par l’avocat du plaignant que ce dernier avait retenu les services d’un avocat et qu’il s’attendait à ce qu’il y ait un procès.

Le plaignant a écrit à l’expert neuf mois plus tard pour lui demander de lui fournir une copie de tous ses renseignements personnels. L’expert lui a répondu que le dossier était fermé, et lui a conseillé d’adresser sa lettre ainsi que toutes autres demandes à l’assureur qui avait fait appel à ses services.

Mécontent de la réponse qu’on lui avait fournie, le plaignant a déposé une plainte contre l’expert auprès du CPVP concernant le refus d'accès à ses renseignements personnels.

Dans sa défense, l’expert a soutenu qu’il n’avait pas privé le plaignant de son droit d’accéder à ses renseignements personnels. Il a affirmé qu’il n’avait fait que lui demander de s’adresser à la partie pour qui les renseignements avaient été recueillis.

Entretemps, le plaignant a obtenu certains de ses renseignements personnels de la société d'avocats qui représentait alors deux des autres victimes de l’accident, ainsi que les intérêts de l’expert en assurance.

La société d'avocats avait refusé de divulguer cinq rapports au plaignant, en se fondant sur le privilège du secret professionnel de l'avocat, et en affirmant qu’il s’agissait d’un produit du travail confidentiel élaboré principalement dans le but d’être présenté à un avocat relativement au litige, et que tous les rapports avaient été élaborés après que le plaignant déclare qu’il avait eu recours aux services d’un avocat et qu’un procès était envisagé.

La société d'avocats a fourni au Commissariat le nom du demandeur, la date et l’objet de chacun des rapports non divulgués. Le Commissariat a cherché à obtenir d’autres précisions auprès de la société d’avocats concernant les dates de demande et l’objet de trois des rapports. Le Commissariat s’interrogeait plus particulièrement sur la différence qu’il y avait entre les rapports pour lesquels le privilège du secret professionnel liant l’avocat à son client avait été invoqué et la série de rapports qui avait été divulguée au plaignant sans allégation de privilège. Une date limite a été donnée à la société d’avocats pour fournir d’autres précisions à l’appui de sa revendication de privilège, au moyen d’une déclaration sous serment signée par la partie qui avait demandé à l’expert en assurance d’établir les rapports.

La date limite n’a pas été respectée; en outre, bien que le Commissariat ait fait parvenir des demandes de suivi pour obtenir les renseignements qui lui étaient nécessaires pour valider les revendications de privilège qui ont été émises concernant les trois rapports non divulgués, la société d’avocats ne lui a jamais fait parvenir l’information demandée.

Conclusions

Rendues le 18 décembre 2008

Application : Le principe 4.9 stipule qu’une organisation doit informer toute personne qui en fait la demande de l’existence de renseignements personnels qui la concernent, de l’usage qui en est fait et du fait qu’ils ont été communiqués à des tiers, et lui permettre de les consulter. Il sera aussi possible de contester l’exactitude et l’intégralité des renseignements et d’y faire apporter les corrections appropriées. L’alinéa 9(3)a) stipule que l’organisation n’est pas tenue de communiquer à l’intéressé des renseignements personnels si les renseignements sont protégés par le secret professionnel liant l’avocat à son client.

Pour rendre sa décision, la commissaire adjointe s’est appuyée sur les considérations suivantes :

  • L’expert en assurance a refusé de communiquer au plaignant les renseignements personnels qu’il lui demandait, affirmant que le dossier était fermé. Il est clair que, selon la Loi, il ne s’agit pas là d’un critère qui justifie le refus d’accorder au plaignant l’accès à ses renseignements personnels.
  • Le privilège rattaché au litige peut s’appliquer aux rapports d’un expert en assurance à condition qu’ils aient été élaborés principalement en vue d’un procès ou dans l’éventualité raisonnable d’un procès. En vertu de l’alinéa 9(3)a), une organisation peut refuser de communiquer des renseignements personnels s’ils sont visés ou protégés par ce privilège.
  • Le plaignant a obtenu ses renseignements personnels de la société d’avocats qui représentait l’expert et un des défendeurs dans le cadre d’une poursuite civile engagée par le plaignant.
  • Certains rapports n’ont pas été divulgués, présumément au titre du secret professionnel liant l’avocat à son client. Tous ces rapports contestés ont été élaborés après la date à laquelle un litige aurait pu raisonnablement être prévu; cette date a été fixée en fonction d’une lettre envoyée par l’avocat du plaignant à cet effet.
  • L’expert en assurance ne peut pas être tenu de fournir au Commissariat des documents pour lesquels un privilège est invoqué, cependant, il doit prouver sa pertinence. Par conséquent, nous avons demandé des preuves pour appuyer la revendication selon laquelle trois des rapports en cause étaient principalement destinés à aider la partie défenderesse à se préparer à contester la réclamation fondée en droit du plaignant. Nous avons demandé que l’information soit fournie au moyen d’une déclaration sous serment signée par la partie qui avait demandé à l’expert d’élaborer les rapports.
  • L’expert n’a pas fourni au Commissariat l’information demandée concernant les documents pour lesquels un privilégie a été invoqué, et n’a donc pas réussi à justifier la demande de privilège relativement à ces documents. Étant donné que la commissaire adjointe n’a pas été en mesure de vérifier que le mis en cause avait eu raison d’invoquer l’alinéa 9(3)a) relativement à l’information en litige, elle a statué que le principe 4.9 n’avait pas été respecté.

Conclusion

La commissaire adjointe a conclu que la plainte était fondée.

Post‑scriptum

La commissaire a déposé un avis de requête à la Cour fédérale, en vertu de l’article 15 de la Loi, pour demander une ordonnance confirmant ou refusant la revendication de privilège de l’organisation relativement aux documents en litige, et demandant à l’organisation de fournir au plaignant les documents en question, si le privilège ne s’appliquait pas.

Peu de temps après le début de la requête en Cour, l’organisation a décidé de divulguer les documents litigieux plutôt que de démontrer le fondement de la revendication de privilège, et la question a été réglée avant qu’une audience n’ait lieu. L’organisation a divulgué au plaignant tous les renseignements auxquels il avait droit au titre de la Loi. En conséquence, la commissaire a abandonné la requête contre l’organisation.

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