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Un expert en sinistres revoit ses pratiques de collecte de renseignements

Résumé de conclusions d’enquête en vertu de la LPRPDE no 2006-362

[Paragraphe 5(3) et principes 4.3, 4.4 et 4.4.1 de l’annexe 1]

Une demandeure croyait avoir consenti à ce qu’un expert en sinistres, travaillant pour le compte d’une compagnie d’assurances, recueille ses renseignements médicaux relatifs à un accident de voiture au cours duquel elle avait subi des blessures. Elle a toutefois été surprise d’apprendre que l’expert avait demandé des renseignements médicaux la concernant qui remontaient à cinq ans. Elle a retiré son consentement, et l’expert n’a jamais recueilli les renseignements en question. Elle s’est ensuite plainte au Commissariat que l’expert en sinistres avait tenté de recueillir une quantité excessive de renseignements. 

Puisque les renseignements personnels de la plaignante n’ont jamais été recueillis, la commissaire adjointe à la vie privée a conclu que la partie de la plainte liée à la collecte de données était non fondée. Toutefois, elle a fait observer que si ces renseignements avaient été recueillis, la compagnie aurait pu contrevenir à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (la Loi). Elle a adressé plusieurs recommandations à l’expert, qui y a pleinement donné suite, et a conclu qu’en ce qui a trait au libellé du consentement et à la limitation de la collecte de renseignements, la plainte était fondée et résolue.

Voici un résumé du déroulement de l’enquête et des délibérations de la commissaire adjointe.

Résumé de l’enquête

La plaignante a été blessée dans un accident de la route. La compagnie d’assurances de l’autre conducteur en cause a chargé un expert en sinistres de mener une enquête.

La plaignante a rencontré l’expert, lequel lui a demandé de signer un formulaire d’autorisation concernant la collecte de ses renseignements médicaux, ce qu’elle a fait. La plaignante a indiqué que l’expert lui avait donné à entendre qu’elle l’autorisait à recueillir ses renseignements médicaux en rapport avec l’accident. Selon elle, l’expert en sinistres aurait obtenu son autorisation sous de faux prétextes, puisque celui-ci a ensuite essayé de recueillir des renseignements personnels pour lesquels elle n’avait pas donné son consentement. Un mois après avoir signé le formulaire d’autorisation, la plaignante a retiré son consentement au moyen d’une lettre dont elle a fait parvenir copie à ses médecins praticiens.   

L’expert en sinistres a précisé que son rôle en tant qu’agent de la compagnie d’assurances consistait à entrer en contact avec la plaignante, à recueillir de l’information de sa part au moyen d’une déclaration signée et à obtenir une autorisation relative à la collecte de ses renseignements médicaux et de ses renseignements liés aux dommages-intérêts afin de déterminer s’il y avait lieu de déposer une réclamation pour dommages corporels. La compagnie d’assurances a chargé l’expert d’obtenir les détails liés à des blessures ou à des problèmes de santé antérieurs et de demander les autorisations médicales et hospitalières appropriées.   

L’expert en sinistres a rencontré la plaignante et a obtenu une déclaration de sa part. Il a appris que la plaignante avait eu un accident en 2003 et qu’elle recevait encore des traitements de physiothérapie. Il lui a demandé de signer des formulaires d’autorisation, dont un formulaire relatif à la collecte de ses renseignements médicaux dans lequel on pouvait lire ce qui suit :

[Traduction]
Par la présente, j’autorise les médecins, hôpitaux, cliniques, institutions ou personnes qui possèdent des renseignements ou des dossiers médicaux me concernant à fournir tout renseignement, rapport ou dossier qui pourrait être requis par (l’expert en sinistres) ou son représentant en ce qui a trait à mon état de santé et à la nature et à la gravité des blessures subies lors de l’accident survenu le (date de l’accident survenu en 2004) ou autour de cette date. 

Le but de la communication et de la collecte de renseignements était expliqué dans le formulaire tel que suit :

[Traduction]
Je comprends que l’assureur, ou son représentant, utilisera les renseignements personnels fournis au moyen de cette demande aux fins suivantes : l’examen et le règlement de mes réclamations et toute autre fin légitime en conformité avec les lois fédérales et provinciales applicables.

La plaignante a indiqué que lorsque l’expert en sinistres a obtenu son autorisation, il lui a donné à entendre qu’elle l’autorisait à recueillir les renseignements médicaux se rapportant expressément à son récent accident. Elle a souligné qu’elle avait consenti verbalement à ce que ses renseignements soient recueillis à cette unique fin.

Peu après que la plaignante a signé le formulaire, l’expert en sinistres a écrit à l’un des médecins traitants de la plaignante ainsi qu’au centre où elle recevait des traitements de physiothérapie pour leur demander ce qui suit :

[Traduction]
[…] nous aurons besoin des dossiers médicaux se rapportant aux blessures subies lors de cet accident ainsi que des dossiers et des notes cliniques concernant cette patiente pour les cinq dernières années. Nous nous intéressons particulièrement à la nature des blessures subies, aux traitements administrés, à la durée de l’invalidité ainsi qu’au pronostic. Vous trouverez ci-joint un formulaire autorisant la communication de ces renseignements.  

Dans son premier rapport à la compagnie d’assurances, l’expert en sinistres a expliqué qu’il avait utilisé les autorisations signées par la plaignante pour demander les notes et dossiers cliniques du physiothérapeute, du massothérapeute et de l’omnipraticien de la plaignante. 

Après avoir été mise au fait de cette demande de renseignements par l’un de ses thérapeutes, la plaignante a écrit à l’expert en sinistres pour lui faire part de ses inquiétudes au sujet du formulaire d’autorisation concernant la collecte de ses renseignements médicaux qu’elle avait, selon elle, été « forcée » de signer. Elle a retiré son consentement par l’entremise d’une lettre dont elle a fait parvenir copie à ses médecins traitants.

Sur réception du premier rapport d’enquête de l’expert en sinistres et avant d’avoir été informée du fait que la plaignante avait retiré son consentement, la compagnie d’assurances a chargé l’expert en sinistres de demander les « autorisations appropriées ». La compagnie d’assurances a prié l’expert en sinistres d’obtenir une autorisation relative à la collecte de l’ensemble des notes et dossiers cliniques de l’omnipraticien depuis le 1er janvier 2000, de même qu’une autorisation relative à la collecte des dossiers du physiothérapeute et du massothérapeute se rapportant aux deux accidents.   

L’expert en sinistres a indiqué qu’il n’avait reçu aucune réponse à ses demandes écrites avant que la plaignante ait retiré son consentement. Le dossier de la plaignante a donc été clos.

Conclusions

Rendues le 14 décembre 2006

Application : Selon le paragraphe 5(3), une organisation ne peut recueillir, utiliser ou communiquer des renseignements personnels qu'à des fins qu'une personne raisonnable estimerait acceptables dans les circonstances. Le principe 4.3 stipule que toute personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu'il ne soit pas approprié de le faire. Selon le principe 4.4, une organisation ne peut recueillir que les renseignements personnels nécessaires aux fins déterminées et doit procéder de façon honnête et licite. Enfin, le principe 4.4.1 stipule qu’une organisation ne doit pas recueillir des renseignements de façon arbitraire. On doit restreindre tant la quantité que la nature des renseignements recueillis à ce qui est nécessaire pour réaliser les fins déterminées. Une organisation doit également préciser la nature des renseignements recueillis comme partie intégrante de ses politiques et pratiques concernant le traitement des renseignements.

Pour rendre sa décision, la commissaire adjointe s’est appuyée sur les considérations suivantes :

  • Il va de soi que pour examiner et régler une réclamation, une compagnie d’assurances doit recueillir les renseignements sur les circonstances entourant la demande.
  • L’expert en sinistres, à titre d’agent de la compagnie d’assurances, a soumis à la plaignante des formulaires d’autorisation relatifs à la collecte de tels renseignements. Selon le libellé du formulaire d’autorisation concernant la collecte des renseignements médicaux, que la plaignante a signé, la plaignante autorisait certaines personnes ou entités à fournir à l’expert en sinistres des renseignements liés à son état de santé et à la nature et à la gravité des blessures qu’elle avait subies lors de son accident survenu en 2004.  
  • Selon la commissaire adjointe, le but d’une telle collecte semblait approprié dans les circonstances et donc conforme au paragraphe 5(3).
  • Néanmoins, le problème ne concernait pas le but mais plutôt la portée des renseignements demandés par l’expert en sinistres. Lorsque ce dernier a tenté de recueillir les renseignements de la plaignante auprès du centre de traitement et du médecin traitant, il demandait les renseignement liés aux blessures subies lors de l’accident survenu en décembre 2004, ainsi que les notes et dossiers cliniques pour les cinq dernières années. Une telle demande ne se limitait pas aux fins précisées dans le formulaire d’autorisation et auxquelles la plaignante avait consenti.  
  • Bien que l’expert en sinistres ait pu déduire que la plaignante saurait qu’il essaierait de recueillir ses renseignements médicaux pour la période précédant l’accident pour lequel elle avait soumis une réclamation étant donné qu’il avait discuté du fait qu’elle recevait des traitements de chiropractie par suite d’un accident de voiture survenu précédemment, le formulaire de consentement que la plaignante avait signé ne faisait mention que de la communication et de la collecte des renseignements en rapport avec son accident le plus récent. Par conséquent, la plaignante s’attendait raisonnablement à ce que les renseignements recueillis par l’expert en sinistres ne se rapportent qu’à cet accident. 
  • Cela dit, l’expert en sinistres n’a, en fait, recueilli aucun renseignement concernant la plaignante puisque celle-ci a retiré son consentement peu après que l’expert en sinistres a adressé sa demande au centre de traitement et au médecin de la plaignante. En principe, il n’a donc pas dérogé aux principes énoncés dans ce rapport.
  • La commissaire adjointe a toutefois fait remarquer que si l’expert en sinistres avait obtenu l’information demandée, on aurait pu juger que la compagnie avait recueilli plus de renseignements personnels que nécessaire pour réaliser les fins déterminées. On aurait probablement conclu que la compagnie avait recueilli ces renseignements à l’insu ou sans le consentement de la plaignante puisque le formulaire que celle-ci avait signé n’autorisait en aucune façon l’expert en sinistres à recueillir de tels renseignements.
  • Il ne faisait aucun doute pour la commissaire adjointe que les pratiques de l’expert en sinistres et le libellé du consentement utilisé dans ses formulaires devaient être modifiés pour que la compagnie respecte pleinement ses obligations au regard de la Loi.
  • La commissaire adjointe a donc recommandé à la compagnie :
    • de mettre en œuvre des procédures afin de s’assurer que lorsqu’elle obtient le consentement d’un demandeur quant à la collecte de ses renseignements personnels, elle limitera les renseignements recueillis à ce qui est nécessaire pour réaliser les fins déterminées;
    • de limiter les renseignements personnels recueillis à ce qui a été consenti par le demandeur;
    • d’utiliser un libellé de consentement conforme à ces pratiques de collecte.
  • L’expert en sinistres a mis en œuvre des procédures pour s’assurer que les demandeurs soient pleinement au courant des renseignements qui seront recueillis par l’expert en sinistres et du fait que la collecte sera limitée aux renseignements se rapportant uniquement aux blessures subies lors de l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si les demandeurs font état d’un problème de santé préexistant qui pourrait avoir une incidence sur les blessures faisant l’objet de l’enquête et que l’expert en sinistres doit examiner ces renseignements, il les demandera après avoir obtenu le consentement approprié.
  • L’expert en sinistres a révisé son formulaire d’autorisation concernant la collecte des renseignements personnels pour tenir compte de ce qui précède.
  • Compte tenu de ces mesures, la commissaire adjointe était convaincue que l’expert en sinistres respectait ses obligations en vertu des principes 4.4 et 4.4.1.

En ce qui concerne la collecte des renseignements, la commissaire adjointe a conclu que la plainte était non fondée. Quant au libellé du consentement et à la limitation de la collecte, la plainte était fondée et résolue.

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