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Les présomptions d’une banque à l’égard du consentement de ses clients sont contestées

Résumé de conclusions d'enquête en vertu de la LPRPDE no 2005-323

(Principe 4.3 de l’annexe 1)

Plainte

Las de recevoir des appels de marketing de sa banque, le plaignant lui a demandé à maintes reprises de cesser de l’appeler chez lui. À son grand dam, il a toutefois continué de recevoir des appels, malgré la mention « ne pas solliciter » figurant à son dossier. La banque aurait en effet établi à l’interne des listes de clients éventuels, listes ayant préséance sur la demande du client de ne pas être sollicité. Le Commissariat a convenu qu’il s’agit d’une pratique inacceptable et a recommandé que la banque y mette fin, ce à quoi la banque a acquiescé.

Les lignes qui suivent décrivent le déroulement de l’enquête et les conclusions rendues par la commissaire à la protection de la vie privée.

Résumé de l’enquête

Avant de déposer une plainte au Commissariat, le plaignant a déclaré qu’il avait communiqué de vive voix avec la banque à au moins trois reprises pour faire retirer son consentement aux appels de marketing provenant de la banque. Toutefois, il ne connaissait pas le nom des employés à qui il avait parlé.

Il a néanmoins continué à recevoir des appels à la maison, qu’il a redirigés vers son téléphone cellulaire afin de pouvoir en déterminer la provenance. Il a fourni au Commissariat les dates et heures des appels ainsi que le numéro de téléphone d’où provenaient les appels. Le Commissariat a confirmé que ce numéro figurait au service de crédit de la banque. Après avoir reçu un autre appel où il était question cette fois-ci d’une assurance‑vie et d’une assurance‑invalidité, le plaignant a communiqué avec le Commissariat.

La banque n’a pas été en mesure de retracer les demandes effectuées par le plaignant pour que son nom soit retiré des listes de marketing. Environ au même moment où la plainte a été déposée, le plaignant avait apparemment communiqué par téléphone avec la banque pour lui demander de mettre fin à ses sollicitations. La banque a alors inscrit à son dossier la mention « ne pas solliciter ».

Selon le plaignant, quelques mois plus tard, un employé d’une des succursales de la banque lui a laissé plusieurs messages téléphoniques chez lui. Le plaignant a réussi à lui parler et lui a demandé comment il avait eu son nom et pourquoi il avait laissé tous ces messages. L’employé aurait répondu qu’il recevait tous les mois du service de cartes de crédit de la banque une liste de noms de personnes à contacter. Le plaignant lui a fait savoir qu’il avait expressément demandé à la banque de supprimer son nom des listes de marketing téléphonique. L’employé s’est excusé et a donné au plaignant l’assurance qu’à l’avenir son nom n’apparaîtrait pas sur les listes.

La banque a expliqué que les succursales reçoivent des « listes de clients éventuels » de deux façons. Selon la première façon, un employé de la banque, bien souvent un représentant du service à la clientèle, peut voir un client effectuer une transaction « au comptoir », ce qui peut donner lieu à un appel de sollicitation par un agent des services bancaires personnels (ou l’équivalent) de la même succursale. Le client peut se trouver au comptoir pour acquitter une facture grâce à un prélèvement à partir d’un compte d’une autre institution financière; il peut faire un commentaire et indiquer qu’une autre banque ne lui a pas fourni la qualité de service à laquelle il s’attendait. En pareil cas, le représentant du service à la clientèle peut prendre note de ce commentaire et le transmettre à un des agents des services bancaires personnels de la succursale. Celui‑ci peut ensuite téléphoner au client pour l’inviter à discuter des services que la banque peut lui offrir afin de mieux répondre à ses besoins financiers.

La banque a déclaré que dans de telles situations, la liste des personnes ne voulant pas être sollicitées, laquelle est gérée par le service central, n’a pas préséance sur les listes de clients éventuels. Elle est d’avis que la plupart des clients qui font retirer leur nom des listes de télémarketing et d’envoi de publicité par la poste demeurent tout de même intéressés à ce que leur succursale locale communique avec eux si elle estime qu’une nouvelle offre est susceptible de les intéresser.

Le plaignant a confirmé au Commissariat qu’il ne s’était pas rendu à la succursale d’où provenaient les derniers appels. Ce scénario ne s’appliquait donc pas à lui.

La banque a expliqué que la deuxième façon d’obtenir les noms de clients éventuels est l'exploration de données. Les succursales reçoivent des noms obtenus du service central de marketing. La plupart du temps, les listes de clients ne voulant pas être sollicités sont respectées, sauf dans les cas où un nom peut avoir été communiqué par le service central en vue d’effectuer un suivi pour un dépôt à terme, un certificat de placement garanti (CPG) ou un renouvellement d’hypothèque. La banque a expliqué que, dans ces cas‑là, il est possible que la succursale ait profité de l’appel pour offrir au client d’autres services, si les circonstances semblaient s’y prêter.

Dans le cas du plaignant, le seul produit ou service de la banque qu’il utilisait était une carte de crédit ne nécessitant aucun renouvellement ni suivi périodique. La banque a confirmé que, selon le service de marketing, le nom du plaignant n’apparaissait sur aucune liste de clients éventuels pendant les mois précédant le moment où il a prétendu avoir reçu des appels de l’employé de la succursale (au début de l’année 2005). Comme l’employé concerné avait reçu un grand nombre de listes de clients chaque mois, il ne se rappelait pas pourquoi il avait laissé plusieurs messages au plaignant lui demandant de le rappeler.

La banque a confirmé que la succursale avait depuis inscrit une note au dossier du plaignant spécifiant de ne pas lui téléphoner, et ce, malgré toutes les listes de clients éventuels susceptibles d’être produites.

Conclusions

Rendues le 22 décembre 2005

Application : Le principe 4.3 prévoit que toute personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu’il ne soit pas approprié de le faire.

Pour rendre sa décision, la commissaire à la protection de la vie privée s’est appuyée sur les considérations suivantes :

  • Le plaignant a prétendu qu’avant de déposer sa plainte, il avait indiqué de vive voix qu’il ne consentait pas à ce que des renseignements personnels le concernant soient utilisés à des fins de marketing. 
  • La banque a déclaré n’avoir aucun document antérieur à la date du dépôt de la plainte se rapportant à un retrait de consentement.
  • En dépit du fait qu’il était mentionné dans le dossier du client de ne pas communiquer avec lui à des fins de marketing, le plaignant a tout de même reçu des appels d’un employé de la banque qui tentait de lui offrir d’autres produits et services.
  • La commissaire a donc conclu que la banque avait utilisé des renseignements personnels concernant le plaignant sans son consentement, ce qui va à l’encontre du principe 4.3. La banque a confirmé que, par suite de l’enquête, une note avait été ajoutée au dossier du plaignant pour indiquer qu’il ne faut pas l’appeler, et ce, en dépit de toutes les listes de clients éventuels susceptibles d’être produites.
  • Après avoir examiné les pratiques de la banque relativement aux listes de clients éventuels établies à l’interne, la commissaire s’est dite extrêmement préoccupée par les présomptions de la banque relativement à ce qu’un client veut signifier lorsque ce dernier dit ne pas vouloir être sollicité et que ce désir est expressément inscrit à son dossier.
  • La banque a indiqué que les succursales peuvent contacter un client même si ce dernier a spécifié ne pas vouloir être sollicité, parce qu’elle considère que le client désire être informé de certaines offres et que ce qu’il souhaite éviter, ce sont les télévendeurs et les envois de publicité.
  • La commissaire juge toutefois que lorsqu’un client ne consent plus à être visé par des activités de marketing, la banque devrait en conclure que le client veut éviter toutes les formes de marketing, qu’il s’agisse d’offres de télévendeurs ou d’employés de sa succursale.
  • Lorsqu’un consommateur retire son consentement au marketing, la banque peut l’informer des conséquences possibles (c’est‑à‑dire lui indiquer qu’il ne recevra aucun appel de télévendeurs, qu’il ne recevra plus d’envois en nombre par la poste et qu’il ne sera pas non plus informé des offres susceptibles de l’intéresser). La commissaire estime qu’il ne revient pas à la banque d’interpréter les besoins du client en fonction de ses propres besoins.
  • La commissaire croit que la banque ne respecte pas le principe 4.3. Elle a donc écrit à la banque pour lui recommander de ne plus solliciter les clients qui font inscrire à leur dossier la mention « ne pas solliciter », et ce, malgré toutes les listes de clients éventuels susceptibles d’être produites pour offrir des produits ou des services particuliers aux clients. La banque avait 30 jours pour répondre.
  • La banque a accepté la recommandation. Elle a indiqué qu’elle l’adopterait de façon à ce que les préférences des clients en matière de « ventes » soient prises en compte et respectées tout en évitant d’avoir à modifier ses activités courantes de maintien et de suivi de ses services. Par exemple, la banque croit que même si un consommateur ne veut pas être sollicité, celui‑ci s’attendra tout de même à ce que la banque communique avec lui au sujet du renouvellement de son hypothèque ou de ses certificats de placement garanti, et à ce qu’elle fasse un suivi périodique de ses investissements, conformément aux modalités établies pour son compte. La commissaire a jugé ces activités raisonnables.
  • La banque a indiqué qu’en raison des changements qui devront être apportés aux outils de vente, elle s’attendait à ce que la mention « ne pas solliciter » ajoutée au dossier des clients soit pleinement respectée et applicable à ses deux méthodes de vente d’ici le début de l’année 2006.
  • La banque a aussi indiqué qu’elle revoyait actuellement ses documents de formation et de relevés destinés à l’ensemble de ses employés afin que tous comprennent bien que désormais, lorsqu’un client ne consent plus à être sollicité, cela signifie que les employés ne doivent plus communiquer avec lui pour lui vendre des services, que ses coordonnées soient obtenues par forage de données ou grâce à des listes de clients. La banque a aussi fait savoir que les noms des clients qui avaient déjà retiré leur consentement étaient désormais retirés des listes de clients.

La commissaire a conclu que la plainte était fondée et maintenant résolue.

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