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Oleinik c. Canada (Commissaire à la protection de la vie privée), 2011 CF 1266, confirmé par 2012 CAF 229 (« Oleinik no 1 ») et 2013 CF 44 (« Oleinik no 2 »)

Juin 2014

Résumé : Ces décisions énoncent certaines règles procédurales quant à la capacité de la Cour fédérale de procéder au contrôle judiciaire des rapports et recommandations de la commissaire à la protection de la vie privée. Il s’agit de deux décisions distinctes portant sur des questions similaires, qui seront examinées tour à tour.

Oleinik no 1

Faits : En 2007, le demandeur a sollicité sans succès une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines (« CRSH »). En 2008, il a adressé à la même institution une demande d’accès à des renseignements personnels se rapportant à ce refus. Le CRSH y a donné suite. Mécontent de la réponse obtenue, le demandeur a déposé une plainte auprès de la commissaire à la protection de la vie privée. Cette dernière a enquêté et produit un rapport dans lequel elle concluait que la plainte n’était pas fondée.

Plutôt que de demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance à l’encontre du CRSH en vertu de l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire visant le rapport de la commissaire à la protection de la vie privée. Il alléguait que cette dernière avait commis une erreur en ne faisant pas droit à sa plainte voulant que le CRSH ait refusé de communiquer des renseignements personnels, et soutenait que la commissaire avait mené son enquête d’une manière contraire aux règles de l’équité procédurale.

Résultat : La Cour fédérale a rejeté la demande. La Cour d’appel fédérale a confirmé la décision de la Cour fédérale sans développer les motifs de la Cour fédérale.

Décision : La Cour fédérale a conclu que le demandeur ne pouvait pas contester les agissements de la commissaire à la protection de la vie privée par voie de contrôle judiciaire. La commissaire ne rend pas de décisions; elle ne fait que formuler des recommandations. Le seul recours ouvert au demandeur est de présenter une demande fondée sur l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels à l’encontre du CRSH.

La Cour a conclu que le demandeur pouvait, par voie de contrôle judiciaire, contester les manquements à l’équité procédurale qu’aurait commis la commissaire à la protection de la vie privée. Le processus d’enquête lui-même était susceptible de contrôle, même si la recommandation finale de la commissaire à la protection de la vie privée ne l’était pas.

Le demandeur invoquait trois manquements d’ordre procédural, que la Cour a rejetés. Premièrement, il alléguait que l’enquêteur de la commissaire à la protection de la vie privée avait commis une erreur en ne tenant pas compte de toute la preuve disponible. La Cour a rejeté cet argument, estimant que le rapport était « équilibré et exhaustif ». Deuxièmement, le demandeur soutenait que l’enquêteur aurait dû lui envoyer une ébauche du rapport et lui permettre de formuler des commentaires. La Cour a conclu que l’enquêteur n’était pas tenu de communiquer une ébauche du rapport et que, de toute manière, celui‑ci avait été « constamment en communication » avec le demandeur pendant l’enquête. Troisièmement, le demandeur faisait valoir que la commissaire à la protection de la vie privée avait fait preuve de partialité, en ce qu’elle favorisait les institutions fédérales en général, et plus précisément qu’elle avait fait preuve d’un préjugé à son égard en raison de son origine ethnique. La Cour a rejeté d’emblée les deux allégations, car aucune preuve ne les étayait.

Oleinik no 2

Faits : Alors que la première affaire judiciaire était en cours, le demandeur a déposé une autre plainte à l’encontre du CRSH, elle aussi jugée non fondée par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (« CPVP »). Le demandeur a également adressé deux demandes d’accès au CPVP visant tous les documents sous sa garde et son contrôle, y compris les renseignements stockés dans son serveur de courriels de sauvegarde. Le CPVP a divulgué plusieurs documents, mais a refusé de communiquer les autres en invoquant différentes dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Le CPVP a informé le demandeur que, s’il n’était pas satisfait des réponses obtenues par ses demandes d’accès, il pouvait déposer une plainte devant le commissaire spécial à la protection de la vie privée. Le demandeur a plutôt déposé une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale à l’encontre du rapport du CPVP et de la réponse à ses demandes d’accès.

Résultat : La Cour fédérale a radié la demande déposée à l’encontre du CPVP.

Décision : La demande visait en partie à soumettre à nouveau une question tranchée par la décision rendue dans Oleinik no 1, à savoir que le demandeur ne pouvait pas contester la teneur du rapport de la commissaire à la protection de la vie privée par voie de contrôle judiciaire. La Cour a donc radié cet élément de la demande au motif qu’il s’agissait d’un abus des procédures de la Cour.

La Cour a radié le reste de la demande au motif que la Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit un autre recours dont pouvait se prévaloir le demandeur : adresser une plainte au commissaire spécial à la protection de la vie privée. Ce commissaire est nommé par la commissaire à la protection de la vie privée, qui lui délègue ses pouvoirs à l’égard des plaintes visant le CPVP. Le mandat du commissaire spécial à la protection de la vie privée consiste notamment à recevoir les plaintes d’individus auxquels l’accès à des renseignements personnels détenus par le CPVP a été refusé, et à mener enquête. Même si le poste de commissaire spécial à la protection de la vie privée n’est pas établi par la loi, c’est à lui qu’il faut soumettre une plainte avant de s’adresser à la Cour fédérale.

Principes :

  1. Un individu ne peut par voie de contrôle judiciaire faire infirmer un rapport de la commissaire à la protection de la vie privée. Ce rapport est non contraignant et ne peut pas être contesté par voie de contrôle judiciaire. Il convient de déposer une demande au titre de l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels à l’encontre de l’institution fédérale qui aurait refusé l’accès à des renseignements personnels en vertu de la Loi.
  2. Il est possible de contester un rapport de la commissaire à la protection de la vie privée pour des raisons d’ordre procédural.
  3. Le CPVP n’est pas obligé de permettre aux plaignants de formuler des commentaires relativement aux ébauches de rapport.
  4. Le CPVP ne fait pas preuve de partialité en faveur des institutions fédérales.
  5. Le CPVP est une institution fédérale également assujettie à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Si un individu demande la communication de renseignements personnels qui sont sous le contrôle du CPVP et qu’il n’est pas satisfait de la réponse qu’il obtient, il doit soumettre une plainte au commissaire spécial à la protection de la vie privée au lieu de s’adresser directement à la Cour fédérale.
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