Déclaration
Déclaration du commissaire à la protection de la vie privée du Canada concernant son rapport annuel au Parlement 2016-2017
Le 21 septembre 2017
Ottawa (Ontario)
Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada, a fait la déclaration suivante au cours d’une conférence de presse à l’Amphithéâtre national de la presse, à Ottawa.
(Le texte prononcé fait foi)
J’ai déposé ce matin mon rapport annuel au Parlement. Il porte principalement sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et sur la question de savoir si le consentement individuel—qui est un élément fondamental de la législation fédérale sur la protection de la vie privée—demeure suffisant pour protéger les droits des Canadiens.
L’an dernier, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada a lancé une consultation sur les défis qui sont liés au consentement. Nous avons examiné le modèle de consentement dans le contexte de la révolution numérique, qui est si importante qu’elle est souvent qualifiée de quatrième révolution industrielle.
La révolution numérique nous a procuré des avantages considérables. Elle contribue grandement à la croissance économique et continuera de le faire. Peu de gens aimeraient revenir à la période précédant l’ère numérique, mais personne n’a accepté de renoncer à sa vie privée en se fondant sur des politiques de confidentialité de 50 pages rédigées dans un jargon juridique que la plupart des avocats ne comprennent pas.
Les Canadiens nous ont dit que les politiques de confidentialité ne fonctionnent plus. Ils souhaitent une meilleure information pour exercer leur droit de donner un consentement valable ou de le refuser. Ils veulent savoir quels renseignements personnels sont recueillis et à quelles fins, à qui ils sont communiqués et quels sont les risques, s’il y en a. Ils s’attendent aussi à ce qu’un organisme de réglementation doté de pouvoirs forts, y compris le pouvoir d’imposer des amendes quand c’est justifié, fasse valoir leurs droits.
La crainte des violations de leur vie privée est réelle. Les Canadiens s’attendent à des solutions concrètes et substantielles pour rétablir leur confiance dans la technologie afin qu’ils puissent la considérer comme un outil qui sert leurs intérêts et non qui porte atteinte à leurs droits.
À la suite des consultations menées pendant un an auprès des consommateurs, de l’industrie et des spécialistes du domaine, j’en suis arrivé à la conclusion que le consentement demeure au cœur de l’autonomie personnelle. Mais d’autres mécanismes sont également nécessaires.
Par exemple, il est clair que les Canadiens doivent pouvoir compter sur un organisme de réglementation indépendant qui dispose des lois et des ressources nécessaires pour renseigner correctement les citoyens, orienter l’industrie, demander des comptes aux entreprises et sanctionner les comportements inacceptables.
Les Canadiens ne se sentent pas protégés par une loi qui n’a pas de mordant et des organisations qui peuvent choisir de suivre ou non mes recommandations.
Je demande que l’on modifie la législation fédérale afin de conférer au Commissariat le pouvoir de rendre des ordonnances et la possibilité d’imposer des sanctions administratives pécuniaires. De cette façon, le Canada s’alignerait sur un grand nombre de ses homologues provinciaux et internationaux – comme les États-Unis et de nombreux pays européens.
Mais le Commissariat n’attendra pas que la loi soit modifiée. Nous prendrons immédiatement des mesures pour améliorer les mécanismes de protection de la vie privée des Canadiens.
Par exemple, nous modifierons nos lignes directrices sur le consentement en ligne. Nous voulons entre autres préciser quatre éléments clés qui doivent être mis en évidence dans les avis de confidentialité et expliqués en termes simples. Nous rédigerons aussi un document d’orientation sur les pratiques inacceptables ou les « zones interdites » – pensons, par exemple, à l’utilisation de renseignements personnels quand on sait qu’elle portera probablement un préjudice grave à la personne concernée.
De plus, nous passerons d’un modèle de l’ombudsman réactif, qui est fondé sur les plaintes, vers un modèle axé sur une application de la loi et une conformité proactives. Dans cette optique, vous pouvez vous attendre à un plus grand nombre d’enquêtes sur des plaintes émanant du commissaire qui portent sur des problèmes persistants ou sectoriels.
À terme, nous adopterons ce modèle d’application de la loi proactive pour obliger les organisations à faire la preuve de leur responsabilité, c’est-à-dire à indiquer les mesures qu’elles prennent pour protéger la vie privée des utilisateurs.
Tout au long de nos consultations, des participants ont souvent affirmé que la responsabilité des entreprises devrait occuper une place plus importante dans la protection de la vie privée, car la nouvelle technologie exerce une pression sur le modèle de consentement. Nous estimons que le consentement continue d’avoir un rôle important à jouer, mais nous reconnaissons qu’il faudrait accorder plus de poids à la responsabilité. Par conséquent, les organisations devraient avoir à démontrer sur demande qu’elles respectent le principe de responsabilité et, ainsi, qu’elles respectent le droit à la vie privée.
Grâce à une application de la loi proactive et à l’obligation de faire preuve de responsabilité, nous pouvons en arriver à une meilleure conformité à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE) qu’avec notre modèle de l’ombudsman actuel.
Le consentement est un enjeu très important pour le droit à la vie privée au Canada. C’est pourquoi ma déclaration d’aujourd’hui porte principalement sur la section du rapport annuel consacrée à ce sujet.
Bien entendu, le rapport traite d’autres enjeux importants, par exemple nos enquêtes sur le système de paye Phénix, sur l’utilisation de capteurs IMSI par la Gendarmerie royale du Canada et sur le site Web MaDemocratie.ca. Il présente aussi les conclusions de plusieurs examens portant sur des questions de sécurité nationale.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions concernant ces enjeux ou d’autres sujets d’intérêt abordés dans notre rapport annuel.
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