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Communication de renseignements liés à une tentative de suicide au Service des douanes et de la protection des frontières des États Unis non autorisée en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels

Plainte présentée en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels (la Loi)

Résumé de l’enquête

  1. Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a reçu une plainte déposée en vertu de la Loi selon laquelle la Gendarmerie royale du Canada (GRC) aurait communiqué des renseignements personnels de façon inacceptable aux autorités frontalières des États Unis par l’intermédiaire du Centre d’information de la police canadienne (CIPC). Le CIPC est un système utilisé par les organismes d’application de la loi pour communiquer des renseignements en matière d’application de la loi et de justice pénale. Il est administré par la GRC au nom de la communauté canadienne d’application de la loi.
  2. La plainte porte sur la communication de renseignements liés à une tentative de suicide de la plaignante. Le Service de police de Toronto (SPT) a versé ces renseignements dans le CIPC et le Service des douanes et de la protection des frontières (CBP) des États Unis y a accédé puis les a utilisés pour interdire la plaignante de territoire en vertu de l’Immigration and Nationality Act (INA). La plaignante a fait valoir que, étant donné son rôle d’administrateur du CIPC, la GRC était en dernier lieu responsable de la communication de ces renseignements.
  3. Le Commissariat a par la suite reçu du député de la plaignante à l’époque des faits une lettre contenant une allégation plus générale, selon laquelle la communication de renseignements liés à des tentatives de suicide aux autorités frontalières des États Unis constituerait une violation systématique du droit à la protection des renseignements personnels des personnes ayant des problèmes de santé mentale.
  4. Le Commissariat a donc axé la portée de son enquête sur la communication au CBP, par l’intermédiaire du CIPC, de renseignements personnels liés à des tentatives de suicide.
  5. Il a été établi dès le début de son enquête que, en vertu d’une entente de coopération entre la GRC et le Federal Bureau of Investigation (FBI), les organismes d’application de la loi du Canada communiquent des renseignements à leurs homologues des États Unis par l’intermédiaire du CIPC. Le Commissariat est d’avis qu’il incombe à la GRC, en tant que signataire de l’entente et administratrice du CIPC, de s’assurer que la communication de renseignements entre les organismes du Canada et des États Unis est conforme aux exigences de l’entente de coopération et respecte la Loi.
  6. Après avoir examiné attentivement les facteurs pertinents et les observations présentées dans le cadre de son enquête, le Commissariat conclut que les plaintes sont fondées.
  7. Au cours de l’enquête, la GRC a apporté plusieurs changements aux fonctionnalités du CIPC et aux principes directeurs du système. Le Commissariat estime que les changements aux fonctionnalités sont positifs, mais que les principes directeurs demeurent nébuleux, et que les renseignements personnels des personnes ayant menacé ou tenté de se suicider sont toujours susceptibles d’être communiqués de façon non autorisée aux autorités frontalières des États Unis.

Plaintes

  1. La première personne à avoir porté plainte dans cette affaire soutient que la GRC a communiqué ses renseignements personnels de façon inacceptable au département de la Sécurité intérieure (DHS) des États Unis, qui les a ensuite utilisés pour lui refuser l’entrée aux États Unis en novembre 2013.
  2. Le député de la plaignante à l’époqueNote de bas de page 1 des faits a également fait parvenir au Commissariat une lettre dans laquelle il soulève la même allégation concernant la communication des renseignements personnels de la plaignante aux autorités frontalières des États Unis, mais aussi des préoccupations de nature plus générale à l’égard du droit à la protection des renseignements personnels des Canadiens voyageant à l’étranger. Le Commissariat a donc entrepris de se pencher, dans le cadre d’une seule et même enquête, sur les dimensions personnelle et générale des allégations, soit l’incident impliquant la plaignante et les préoccupations d’ordre général du député, respectivement.
  3. Dans le cas de l’allégation directement liée à la plaignante, aux termes de l’alinéa 29(1)a) de la Loi, le commissaire à la protection de la vie privée reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes déposées par des individus qui prétendent que des renseignements personnels les concernant et détenus par une institution fédérale ont été utilisés ou communiqués contrairement aux articles 7 (usage) ou 8 (communication) de la Loi.
  4. En ce qui concerne les allégations soulevées par le député de la plaignante, le sous alinéa 29(1)h)(ii) de la Loi précise que le commissaire à la protection de la vie privée reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes portant sur toute autre question relative à l’usage ou à la communication des renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale. Cela comprend des problèmes systémiques pour lesquels les renseignements personnels de la plaignante ne sont pas nécessairement en cause.
  5. Toute référence à « la plainte » ou à « la plaignante » ci après renvoie à la première plainte, dont il est question aux paragraphes 1, 8 et 10 du présent rapport, à moins qu’il en soit indiqué autrement.

Contexte de la plainte

  1. Selon la plainte écrite, en novembre 2013, la plaignante devait prendre un vol à destination de l’aéroport New York LaGuardia (LGA) à partir de l’Aéroport international Toronto Pearson (YYZ). YYZ est l’une des nombreuses zones de précontrôle du Service des douanes et de la protection des frontières (CBP)Note de bas de page 2 des États Unis. Les voyageurs en partance d’YYZ vers la plupart des destinations aux États Unis doivent franchir les douanes états uniennes et le contrôle de sécurité préembarquement avant de prendre leur volNote de bas de page 3. La plaignante souhaitait entrer aux États Unis pour une courte période, pendant son transit vers sa destination vacances, située à l’extérieur des États Unis.
  2. La plaignante a déclaré ne pas avoir réussi à franchir le processus de contrôle de sécurité initial des douanes états uniennes et avoir été envoyée pour une vérification secondaire, pendant laquelle elle a été placée en garde à vue et interrogée par un agent du CBP. Elle soutient que l’agent l’a questionnée plus particulièrement sur sa santé mentale, notamment sur les détails d’une tentative de suicide faite en 2012. Elle s’est vu remettre un retrait de demande d’admission/avis des autorités consulaires, formulé en partie comme suit :

    [traduction] Les vérifications effectuées dans le système au sujet de [la plaignante] ont donné des résultats positifs. [La plaignante] a eu un épisode de maladie mentale en juin 2012. [La plaignante] doit subir une évaluation médicale relativement à cet épisode qui permettra de déterminer si elle est autorisée à voyager aux États Unis. [La plaignante] n’a pas pu convaincre l’agent d’inspection de son admissibilité à un statut de non immigrante, comme l’exige le paragraphe 214(b) de l’INA. [La plaignante] est donc interdite de territoire aux États Unis, en application du paragraphe 212(a)(1)(A)(iii)(I) de l’INA […].

  3. Aux termes du paragraphe 212(a)(1) de l’Immigration and Nationality Act (INA), un étranger peut être interdit de territoire aux États Unis pour certains motifs liés à la santé. Selon le paragraphe 212(a)(1)(A)(iii)(I)Note de bas de page 4 de cette même loi, un étranger considéré comme ayant un trouble physique ou mental et un comportement associé pouvant représenter ou ayant représenté une menace pour ses biens, sa sécurité ou son bien être ou encore ceux d’autrui est interdit de territoire aux États Unis. C’est sur le fondement de cette disposition que la plaignante s’est vue refuser l’entrée aux États Unis.
  4. La plaignante a retiré sa demande d’admission aux États Unis. Elle a ensuite été informée qu’elle pouvait demander une dispense après avoir subi une évaluation médicale des États Unis aux fins de l’immigration.
  5. Au cours de l’enquête, la plaignante a confirmé avoir fait une tentative de suicide par surdose de pilules en juin 2012. Elle a déclaré avoir composé le 911 pour obtenir de l’aide après avoir changé d’idée. Il y a alors eu intervention des services ambulanciers ainsi que du Service de police de Toronto (SPT). La plaignante soutient avoir reçu des traitements à ce moment là et n’avoir eu aucun épisode de maladie mentale depuis.
  6. La GRC a confirmé que le CBP avait accédé aux renseignements personnels de la plaignante par l’intermédiaire du Centre d’information de la police canadienne (CIPC) à la date à laquelle la plaignante devait prendre son vol, à partir d’un terminal d’ordinateur situé dans la zone de précontrôle du CBP à YYZ.
  7. Le CIPC est un système exploité par le Centre d’information de la police canadienne (IPC), sous la gouvernance des Services nationaux de police de la GRC, au nom des services de police canadiens. Il fournit des renseignements relatifs à la sécurité publique et plus particulièrement aux chefs d’accusation, aux mandats, aux personnes d’intérêt ainsi qu’aux biens et véhicules volés. Il s’agit du principal outil canadien lié à la sécurité des agents et du public. Il est utilisé par les organismes d’application de la loi pour communiquer des renseignements se rapportant à l’application de la loi et à la justice pénale.
  8. Les renseignements auxquels a accédé le CBP consistaient en un indicateur de mise en garde et en une entrée « Intérêt particulier pour la police » (IPP), saisis dans le CIPC par le SPT en juillet 2012Note de bas de page 5. L’indicateur de mise en garde révélait que la plaignante a des tendances suicidaires. L’entrée IPP indiquait [traduction] « Tendances suicidaires » et comprenait la remarque additionnelle [traduction] « Tentative de suicide — drogue ». Parmi les données saisies figuraient aussi des renseignements biographiques sur la plaignante, notamment son nom, son sexe, sa race, son âge, sa date de naissance, son poids, son adresse domiciliaire et son numéro de permis de conduire. La GRC a joint à ses observations à l’intention du Commissariat une copie imprimée de l’entrée au CIPC en question.

ENQUÊTE DE LA COMMISSAIRE À L’INFORMATION ET À LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS DE L’ONTARIO SUR LA COMMUNICATION DE RENSEIGNEMENTS LIÉS À DES TENTATIVES DE SUICIDE PAR L’INTERMÉDIAIRE DU CIPC

  1. En réponse à l’expérience de la plaignante et à celles d’autres Ontariens dont les tentatives de suicide ont été communiquées aux autorités frontalières des États Unis, la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario a mené une enquête sur la communication, par les services de police de l’Ontario (y compris le SPT), de renseignements liés à des tentatives de suicide aux autorités frontalières des États Unis par l’intermédiaire du CIPC. Dans le cadre de son enquête, la commissaire a recueilli des renseignements auprès de différents services de police de l’Ontario, de la GRC ainsi que de plusieurs professionnels et organismes en santé mentale afin de déterminer si cette communication est autorisée ou non en vertu de l’article 32 de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée de l’Ontario.
  2. Il a résulté de cette enquête un rapport intitulé « Crossing the Line: the Indiscriminate Disclosure of Attempted Suicide Information to U.S. Border Officials via CPIC », publié le 14 avril 2014Note de bas de page 6. Dans ce rapport, la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario conclut notamment ce qui suit :

    [traduction]
    1. Il existe des écarts dans les pratiques des services de police de l’Ontario en ce qui concerne le versement de renseignements liés à des tentatives de suicide dans le CIPC. Certains services de police, par exemple le SPT, ont versé des renseignements sur toutes les tentatives de suicide confirmées, peu importe les circonstances. D’autres ont quant à eux exercé leur pouvoir discrétionnaire et se sont demandé, avant de procéder, si la personne concernée était susceptible d’être violente ou de représenter une menace pour un agent ou la sécurité publiqueNote de bas de page 7.
    2. Les renseignements que recueillent les services de police relativement à des tentatives de suicide servent avant tout à documenter leur rôle lors de l’incident, pour leurs propres dossiers locaux, ce qui est tout à fait légitime. Dans certaines circonstances, la collecte de ces renseignements peut également servir à une ou à plusieurs des fins suivantes :
      • aider les agents à déterminer les interventions et mesures appropriées lorsqu’ils répondent à un appel de service;
      • déterminer les interventions et mesures appropriées pour les personnes susceptibles de se trouver sous garde policière;
      • protéger le public, les policiers et la personne elle même.
    3. De nombreux incidents de tentative de suicide ne comportent aucun risque de violence envers autrui ni aucune menace pour un agent ou la sécurité publique. De plus, la communication de renseignements de nature aussi délicate peut avoir une incidence négative importante sur les gens et aggraver des stigmates liés à la santé mentale.
    4. La communication de renseignements liés à des tentatives de suicide à d’autres organismes canadiens d’application de la loi et aux autorités frontalières des États Unis par l’intermédiaire du CIPC ne devrait se produire que lorsqu’il y a menace pour la sécurité d’un agent ou du public. Elle doit se faire aux mêmes fins que celles pour lesquelles les renseignements ont été recueillis et, par conséquent, conformément à l’article 32 de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée. À ce titre, la pratique consistant à communiquer par défaut des renseignements sur toutes les tentatives de suicide par l’intermédiaire du CIPC n’est pas autorisée par la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée.
  3. À la suite de son enquête, la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario a formulé plusieurs recommandations, dont une selon laquelle les services de police de l’Ontario devraient appliquer ce qu’elle appelle le « critère de communication de renseignements sur la santé mentale », qui décrit les circonstances dans lesquelles, à son avis, la communication de renseignements personnels liés à des tentatives de suicide serait autorisée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée. D’après ce critère, au moins une des quatre circonstances suivantes doit s’appliquer pour que des renseignements liés au suicide puissent être versés au CIPC et communiqués aux autorités frontalières des États Unis par l’intermédiaire de ce système :
    1. la personne s’est montrée très violente à l’égard d’autres personnes, leur a infligé des blessures graves ou a proféré des menaces en ce sens;
    2. la tentative de suicide pourrait raisonnablement être considérée comme une provocation intentionnelle en réponse à une intervention mortelle de la police;
    3. la personne a des antécédents de violence grave ou représente un danger pour autrui;
    4. la tentative de suicide a été faite pendant que la personne était sous garde policière.

Portée de l’enquête du Commissariat

  1. La plainte déposée auprès du Commissariat concerne la communication de renseignements personnels entre le SPT et le CBP — deux organismes ne relevant pas du Commissariat — par l’intermédiaire du CIPC. Bien que ce soit le SPT qui ait versé les renseignements personnels de la plaignante dans le CIPC, la plaignante soutient que la GRC est en dernier lieu responsable de leur communication au CBP, communication qui, à son avis, contreviendrait à la Loi.
  2. Il a été établi dès le départ, à partir de renseignements fournis par la GRC, que cette dernière est responsable de l’administration du CIPC. Dans le cadre de son enquête, le Commissariat s’est donc penché sur le rôle de la GRC dans la gestion du CIPC, notamment pour ce qui est d’accorder aux organismes d’application de la loi associés (organismes associés au CIPC) un accès aux renseignements personnels contenus dans le système. Le mandat de la GRC à cet égard inclut également la responsabilité de tous les accords ou ententes en vertu desquels des organismes d’application de la loi étrangers peuvent se voir accorder un accès au système.
  3. La GRC a fait savoir qu’elle publie un manuel des principes directeurs du CIPC (ci après le « manuel des principes directeurs ») et un manuel de l’utilisateur du CIPC (ci après le « manuel de l’utilisateur ») qui, ensemble, forment les principes directeurs du CIPC. Ces manuels visent à guider les organismes associés au CIPC relativement à la collecte, à l’utilisation et la communication adéquates des renseignements consignés dans le CIPC.
  4. Tous les organismes associés au CIPC, y compris les services de police nationaux et les organismes d’application de la loi étrangers, sont assujettis aux principes directeurs du CIPC, dont la responsabilité incombe au directeur général du Centre d’IPC. Celui ci 1) détermine la portée et le contenu des dossiers, des catégories, des fichiers et des banques de données du CIPC, 2) établit de quelle façon le système est utilisé et régulé et 3) dresse la liste des critères permettant de déterminer quels organismes sont autorisés à utiliser le système.
  5. Les principes directeurs du CIPC sont élaborés en consultation avec le Comité consultatif sur les services nationaux d’information policière (CCSNIP), composé de 16 membres votants, dont un représentant de chaque association provinciale des policiers. Ce comité assure une surveillance stratégique, exerce un leadership et fournit une orientation relativement à l’administration du développement et de l’utilisation du CIPC. Il relève du commissaire de la GRC, qui est en dernier lieu responsable de l’administration et de l’exploitation du CIPC. La GRC soutient que, étant donné cette structure de gouvernance, les décisions que prend le Centre d’IPC quant aux fonctionnalités et aux principes directeurs du CIPC ne sont pas unilatérales.
  6. Bien que le Commissariat comprenne la nature collaborative de la gouvernance du CIPC, il est d’avis qu’en tant qu’administratrice — le commissaire de la GRC étant ultimement responsable de l’administration et de l’exploitation du système — la GRC exerce sur le CIPC un niveau de contrôle suffisant pour que l’article 8 de la Loi s’applique à la communication des renseignements personnels consignés dans le CIPC au CBP.
  7. La question visée par l’enquête du Commissariat ne concerne pas tous les renseignements d’enquête ni toutes les dénonciations figurant au CIPC. Le Commissariat reconnaît l’importance du CIPC pour les services de police en tant qu’outil national de communication de renseignements permettant aux partenaires d’application de la loi et de sécurité publique de travailler ensemble de manière efficace. L’enquête porte plutôt sur la question précise de la communication au CBP, par l’intermédiaire du CIPC, de renseignements personnels relatifs à des tentatives de suicide, sur les mécanismes au moyen desquels ces renseignements sont communiqués (indicateurs de mise en garde et entées IPP) ainsi que sur les principes directeurs et procédures se rapportant à l’utilisation de ces fonctions dans le CIPC.

Le rôle de la GRC dans la gestion du CIPC

COMMENT LE CBP A-T IL EU ACCÈS AUX RENSEIGNEMENTS DU CIPC?

  1. La GRC a fait savoir que le CBP avait accédé au CIPC en vertu d’une entente de coopération entre la GRC et le Federal Bureau of Investigation (FBI), entente qui permet l’échange par voie électronique de renseignements contenus dans le CPIC et le système équivalent des États Unis, le National Crime Identification Centre/Interstate Identification Index (NCIC/III)Note de bas de page 8. L’entente de coopération a pris effet le 6 mai 1999 et a été renouvelée le 25 juillet 2008Note de bas de page 9. À moins d’indication contraire, tout renvoi à l’entente de coopération dans le présent rapport concerne la version de 2008, soit celle en vigueur au moment de l’incident en question.
  2. Le FBI est l’organe du département de la Justice des États Unis responsable de l’application des lois états uniennes. Il est également chargé de faciliter l’échange d’informations entre les organismes d’application de la loi des États Unis. En vertu de l’entente de coopération, le FBI a autorisé le département de la Sécurité intérieure (DHS) et, par extension, le CBP, à accéder au CIPC. La GRC a précisé que le FBI bénéficiait d’un accès en « lecture seule ». Cela signifie que le FBI et ses organismes partenaires pouvaient accéder aux bases de données du CIPC, mais qu’ils n’étaient pas en mesure d’y saisir directement de l’information.
  3. Le Centre d’IPC avait aussi établi des limites quant aux renseignements de ses bases de données que le FBI et ses organismes partenaires pouvaient visualiser en vertu de l’entente de coopération. Ils n’avaient pas accès, par exemple, aux renseignements concernant les jeunes contrevenants, les personnes visées par un mandat d’arrêt provincial, les personnes non reconnues coupables (verdicts de non culpabilité, acquittements, retraits, arrêts des procédures ou engagements de ne pas troubler l’ordre public) ou les casiers judiciaires suspendus (dossiers de réhabilitation). Le Commissariat a cependant reçu confirmation que le FBI et ses organismes partenaires, y compris le CBP, avaient accès aux indicateurs de mise en garde et aux entrées IPP.
  4. L’entente de coopération indiquait que les renseignements obtenus par l’intermédiaire du CIPC ou du NCIC/III ne pouvaient être utilisés qu’à des [traduction] « fins de justice pénale », expression qu’elle définissait comme suit : [traduction] « On entend par “fins de justice pénale” que les organismes d’application de la loi et de justice pénale doivent utiliser les données du CIPC et du NCIC/III exclusivement dans le cadre d’activités d’application de la loi et de justice pénale, ce qui comprend les questions de sécurité nationale, conformément au mandat que confère aux pays concernés leur législation respective ». L’entente de coopération ne définissait pas les termes « application de la loi » et « justice pénale ».
  5. L’entente de coopération précisait que la législation canadienne en matière de protection des renseignements personnels et le manuel des principes directeurs du CIPC exigeaient des utilisateurs de données du CIPC qu’ils établissent l’exactitude et la validité d’une entrée du CIPC avant de l’utiliser. Ainsi, tous les renseignements recueillis par les organismes d’application de la loi des États Unis par l’intermédiaire du CPIC auraient dû être confirmés auprès des organismes contributeurs afin que soient établies leur exactitude et leur pertinence avant leur utilisation à quelque fin que ce soit.

INDICATEURS DE MISE EN GARDE ET ENTRÉES IPP LIÉS À DES TENTATIVES DE SUICIDE DANS LE CIPC

  1. Le CIPC se compose de quatre banques de données individuelles : la banque de données d’enquête, la banque de données de l’identité judiciaire, la banque de renseignements criminels et la banque de données auxiliaires. Les renseignements dont il est question en l’espèce se trouvaient dans la banque de données d’enquêteNote de bas de page 10.
  2. Les indicateurs de mise en garde et les entrées IPP sont des données séparées et distinctes de la banque de données d’enquête du CIPC qui peuvent être utilisées de façon simultanée. Les indicateurs de mise en garde signalent les interactions préoccupantes passées tandis que les entrées IPP permettent à un organisme contributeur de saisir des données et des commentaires pertinents au sujet d’une personne, y compris les raisons pour lesquelles elle présente un intérêt particulier pour la police.
  3. Dans le manuel de l’utilisateur, il était énoncé que les organismes associés au CIPC devaient utiliser l’indicateur de mise en garde pour [traduction] indiquer que le sujet au dossier était considéré comme dangereux pour lui même ou pour autrui. Une entrée IPP pouvait être utilisée pour enregistrer des données sur les personnes appartenant à certaines catégories de délinquants connus, par exemple celles ayant des antécédents d’infractions violentes, d’infractions sexuelles et/ou de violence familiale. Le manuel de l’utilisateur indiquait également qu’une entrée IPP pouvait être utilisée dans le cas d’une personne connue comme étant dangereuse pour la police, pour elle même ou pour autrui, y compris une personne souffrant d’un trouble émotionnel ou de santé mentale apparent ou ayant menacé ou tenté de se suicider, sous garde ou non.
  4. Dans ses observations, la GRC a indiqué que la communication de renseignements en lien avec des personnes qui ont menacé ou tenté de se suicider et qui sont susceptibles de représenter un risque pour leur propre sécurité ou celle d’autrui aide la police à exercer son mandat et ses fonctions, lesquels comprennent le maintien de la paix, la prévention de la criminalité, les enquêtes criminelles et la protection de la vie et des biens.
  5. La GRC a caractérisé ce type de renseignements comme étant critiques pour la sécurité publique et comme ayant une valeur importante en cas de contact futur avec le sujet au dossier. Selon elle, ces entrées permettent aux autorités policières d’évaluer les dangers potentiels pour leur personnel, le grand public et la personne elle même, et de déterminer les ressources susceptibles d’être requises pour réagir adéquatement à la situation. De plus, la GRC a expliqué que les utilisateurs du CIPC ont confiance que si des renseignements ont été ajoutés dans le système, c’est que l’organisme contributeur les a jugés critiques pour la sécurité publique.
  6. Dans le cas de la plaignante, comme il a été mentionné précédemment, le SPT a créé l’indicateur de mise en garde [traduction] « Tendances suicidaires » en fonction de ses interactions antérieures avec la plaignante. Il a également créé une entrée IPP liée à la santé mentale à laquelle il a ajouté la remarque [traduction] « Tentative de suicide – médicaments ».
  7. Selon les observations de la GRC, les principes directeurs du CIPC en vigueur en novembre 2013 laissaient aux organismes associés au CIPC le soin de déterminer dans quelles circonstances l’utilisation d’indicateurs de mise en garde et d’entrées IPP était appropriée. La GRC a insisté sur le fait que les principes directeurs et protocoles relatifs au CIPC n’exigeaient pas que toutes les tentatives de suicide soient répertoriées dans le système.
  8. En général, les principes directeurs du CIPC laissaient aux organismes associés au CIPC le soin de déterminer s’il existait des raisons de sécurité publique et d’application de la loi justifiant la communication de renseignements personnels par l’intermédiaire du CIPC. Il revenait donc à chaque organisme du CPIC de déterminer si des lois fédérales ou provinciales, notamment la législation relative à la protection des renseignements personnels, interdisaient la communication des renseignements.
  9. Afin d’assurer l’exactitude des renseignements communiqués par l’intermédiaire du CIPC, les organismes concernés par la communication et la collecte de renseignements du système étaient assujettis, en vertu des principes directeurs du CIPC et de l’entente de coopération, à certaines obligations exigeant d’eux qu’ils vérifient la pertinence et l’exactitude des renseignements avant leur utilisation.

CONSERVATION DES INDICATEURS DE MISE EN GARDE ET DES ENTRÉES IPP DANS LE CIPC

  1. Les entrées IPP étaient assorties d’une date de suppression après cinq ans. Le CIPC générait automatiquement un avis à l’intention de l’organisme émetteur 30 jours avant la date prévue de la suppression. Il revenait ensuite à l’organisme en question de décider si l’entrée IPP devait être supprimée (auquel cas aucune autre mesure n’était nécessaire) ou renouvelée. Si l’organisme émetteur souhaitait en prolonger la période de conservation, il devait renouveler manuellement la date d’expiration dans le CIPC.
  2. Les indicateurs de mise en garde ne comportaient aucune date de suppression et n’avaient aucune incidence sur la suppression automatique des entrées IPP. Le manuel de l’utilisateur précisait que, dans le cas de personnes suicidaires, les indicateurs de mise en garde devaient être conservés aussi longtemps que nécessaire.
  3. Dans ses observations, la GRC a insisté sur le fait qu’il était (et qu’il est encore) de la responsabilité des organismes contributeurs au CPIC de procéder à un examen approprié pour s’assurer que seuls les renseignements sur la sécurité publique valides demeuraient dans le système.
  4. L’entrée IPP concernant la plaignante expirait au 30 juin 2017, mais elle a été supprimée du CIPC par le SPT, tout comme l’indicateur de mise en garde (d’autres détails à cet effet sont fournis aux paragraphes 105 et 106 du présent rapport).

CONFIDENTIALITÉ ET COMMUNICATION DES RENSEIGNEMENTS DU CIPC

  1. En ce qui concerne l’utilisation appropriée des renseignements du CIPC, tant l’entente de coopération que les principes directeurs du CIPC contenaient des exigences de vérification auprès des organismes émetteurs de ces renseignements avant leur utilisation par un autre organisme associé au CIPC.
  2. Le manuel des principes directeurs indiquait que les renseignements versés et stockés dans le CIPC ainsi que ceux qui en étaient extraits étaient fournis à titre confidentiel par les organismes contributeurs, dans le but de faciliter la détection, la prévention et la suppression du crime ainsi que l’application de la loiNote de bas de page 11. Il indiquait aussi que chaque organisme ayant accès aux dossiers du CIPC était responsable de la confidentialité et de la communication des renseignements consignés dans le système.

    [Traduction] Tout dossier versé dans le CIPC doit être tenu à jour par l’organisme émetteur, tant et aussi longtemps qu’il demeure dans le système. Un organisme doit être en mesure de valider rapidement ses dossiers au CIPC, tous les jours, 24 heures par jour.

  3. De même, le manuel des principes directeurs expliquait aussi qu’un organisme versant des renseignements dans le CIPC demeurait responsable de ces renseignements.

    [Traduction] Tout dossier versé dans le CIPC est réputé être sous le contrôle de l’organisme émetteur. L’accès à ce dossier ne peut être accordé que par l’organisme contributeur, sur présentation d’une demande à l’organisme/au ministère, conformément à la législation fédérale/provinciale applicable en matière d’accèsNote de bas de page 12.

  4. La GRC a confirmé que l’utilisation des renseignements personnels de la plaignante par le CBP contrevenait aux exigences de vérification de l’information auprès de l'émetteur avant l’utilisation, détaillées à la fois dans l’entente de coopération et dans le manuel des principes directeurs. De plus, dans le cas de la plaignante, l’entrée IPP indiquait clairement que le SPT était le propriétaire du dossier et portait les mentions claires [traduction] « NE PAS RÉVÉLER AU SUJET L’INTÉRÊT QU’ON LUI PORTE » et [traduction] « CONFIRMER AUPRÈS DE L’ORGANISME ÉMETTEUR » (majuscules dans l’original).
  5. La GRC a fait savoir qu’elle avait communiqué avec le FBI pour l’informer de l’incident et pour lui demander de rappeler au CBP ses obligations en vertu de l’entente de coopération. Elle a aussi indiqué qu’à la suite de cette communication, un examen de l’affaire avait été effectué par le CBP et de nouvelles recommandations avaient été formulées à l’intention du personnel du CBP relativement à l’utilisation appropriée des renseignements obtenus par l’intermédiaire du CIPC.

Changements apportés au CIPC au cours de l’enquête du Commissariat

  1. En septembre 2014, le commissaire de la GRC a écrit au Commissariat pour lui faire savoir qu’en reconnaissance de l’importance de la protection des renseignements personnels des Canadiens et de son engagement à protéger la vie privée, le Centre d’IPC avait apporté plusieurs changements au CIPC, notamment les suivants :

    [traduction]
    • Un nouveau type d’entrée IPP, plus précisément une entrée sur les comportements observés (CO), a été ajoutée pour fournir des indications sur un sujet ayant démontré un comportement soulevant des préoccupations quant à sa sécurité ou à cette d’autrui.
    • Un champ optionnel « COMMUNIQUER AUX É. U. » directement lié aux entrées IPP-CO a été ajouté pour permettre aux organismes émetteurs de déterminer si leur entrée sur les CO contient ou non des renseignements essentiels à la sécurité publique qui doivent être communiqués aux organismes des États Unis, y compris les autorités frontalières.
    • En mai 2015, la catégorie d’entrée IPP relative à la santé mentale ainsi que les indicateurs de mise en garde relatifs à des tendances suicidaires ou à de l’instabilité mentale ont été supprimés du CIPC.
    • Afin d’harmoniser la façon dont les organismes canadiens accèdent à l’information, le Centre d’IPC a accordé aux organismes d’application de la loi et de justice pénale des États Unis un accès particulier en fonction de leur mandat. Cet accès particulier est maintenant catégorisé en 21 critères de classification filtrés qui reflètent, autant que possible, les critères d’inclusion du CPIC en vigueur au Canada. Bien que cette harmonisation n’ait eu aucune incidence sur la façon dont le CBP est catégorisé, la GRC a limité ou retiré les droits d’accès au CIPC de plusieurs autres organismes des États Unis.
    • L’entente de coopération entre la GRC et le FBI permettant l’accès au CIPC a été revue afin de mettre l’accent sur la nécessité de se conformer aux principes directeurs du CIPC et aux procédures connexes.
  2. La GRC a par la suite fourni des copies du manuel de l’utilisateur du CIPC du printemps 2015 et de la version révisée du manuel des principes directeurs du CIPC entrée en vigueur en mai 2015. Tous deux ont été révisés afin que soient pris en compte les changements au système décrits dans la correspondance du commissaire de la GRC.

Articles applicables de la Loi

  1. L’article 3 de la Loi définit les renseignements personnels comme étant les renseignements, quels que soit leur forme et leur support, concernant un individu identifiable, notamment les renseignements relatifs à sa race, à son origine nationale ou ethnique, à sa couleur, à sa religion, à son âge ou à sa situation de famille, les renseignements relatifs à son éducation, à son dossier médical, à son casier judiciaire, à ses antécédents professionnels ou à ses transactions financières, tout numéro qui lui est propre, ses empreintes digitales ou son groupe sanguin, ses opinions personnelles, etc.
  2. Les renseignements contenus dans le CIPC auxquels le CBP a accédé et qu’il a utilisés sont clairement des renseignements personnels de la plaignante puisqu’ils comprennent son nom, son sexe, sa race, son âge, sa date de naissance, son poids, son adresse domiciliaire et son numéro de permis de conduire ainsi que de l’information sur la perception de sa santé mentale.
  3. De l’avis du Commissariat, les renseignements liés à une tentative de suicide se rapportent à la santé ou à l’état mental d’une personne et sont considérés comme étant de nature particulièrement délicate.
  4. Aux termes de la Loi, les renseignements personnels ne peuvent être communiqués qu’avec le consentement de la personne qu’ils concernent (paragraphe 8(1)) ou dans l’un des cas d’autorisation prévus au paragraphe 8(2) de la Loi.
  5. La plaignante soutient que la communication de ses renseignements personnels au CBP contrevenait à l’article 8 de la Loi parce qu’elle n’y avait pas consenti. À son avis, ces renseignements n’auraient pas dû être transmis aux autorités frontalières des États Unis. Le fait que la plaignante n’ait pas consenti à la communication de ses renseignements personnels au CBP n’est pas contesté en l’espèce. La communication n’était donc pas autorisée en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi.
  6. Le Commissariat doit par conséquent déterminer si la communication des renseignements au CBP par l’intermédiaire du CIPC était autorisée en vertu du paragraphe 8(2) de la Loi. La même décision doit être rendue relativement aux allégations plus générales du député de la plaignante.
  7. Aux termes du paragraphe 8(2), sous réserve d’autres lois fédérales, la communication des renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale est autorisée. Les alinéas a) à m) décrivent ensuite les fins précises aux fins desquelles cette communication serait autorisée.
  8. La GRC soutient que les autorités des États Unis, y compris les autorités frontalières, se sont vu accorder l’accès aux renseignements personnels contenus dans le CIPC en vertu de la disposition sur la communication prévue à l’alinéa 8(2)f) de la Loi, selon laquelle la communication des renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale est autorisée, notamment dans le cas suivant :

    [C]ommunication aux termes d’accords ou d’ententes conclus d’une part entre le gouvernement du Canada ou l’un de ses organismes et, d’autre part, le gouvernement […] d’un État étranger, une organisation internationale d’États ou de gouvernements […] ou l’un de leurs organismes, en vue de l’application des lois ou pour la tenue d’enquêtes licites.

  9. La GRC croit que sa position est par ailleurs confirmée par la notion d’autorisation de communiquer à des fins d’« usages compatibles », énoncée à l’alinéa 8(2)a) de la Loi, selon lequel des renseignements personnels peuvent être communiqués par une institution « aux fins auxquelles ils ont été recueillis ou préparés par l’institution ou pour les usages qui sont compatibles avec ces fins ». La GRC a fait référence à la description Info Source du fichier de renseignements personnels (FRP) GRC PPU 005Note de bas de page 13 pour appuyer sa position.
  10. Le fichier GRC PPU 005 contient des renseignements personnels sur les personnes ayant fait l’objet d’enquêtes instituées aux termes du Code criminel, de lois provinciales et fédérales, d’un règlement municipal ou d’une ordonnance ainsi que des renseignements du CIPCNote de bas de page 14. Selon la description des usages compatibles, les renseignements contenus dans ce fichier peuvent être communiqués aux organismes canadiens et étrangers reconnus chargés de l’application de la loi et aux organismes étrangers chargés de la tenue d’enquêtes, aux tribunaux et aux services du système de justice pénale aux fins de l’administration ou de l’application de la loi et de la détection, de la prévention ou de la suppression du crime en général.

Analyse

A) LA COMMUNICATION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS DE LA PLAIGNANTE ÉTAIT ELLE AUTORISÉE EN VERTU DE L’ALINÉA 8(2)f) DE LA LOI?

  1. Comme il a été mentionné précédemment, l’alinéa 8(2)f) permet à un organisme du gouvernement du Canada de communiquer des renseignements personnels à un organisme du gouvernement d’un État étranger « aux termes d’accords ou d’ententes […] en vue de l’application des lois ou pour la tenue d’enquêtes licites ». Il ne s’agit donc pas d’une autorisation à portée illimitée de communiquer des renseignements à des autorités étrangères. La communication doit à tout le moins respecter les conditions d’un accord ou d’une entente entre l’institution fédérale canadienne et l’autorité étrangère. Toute communication de renseignements doit aussi être limitée aux fins de l’administration ou de l’application d’une loi ou encore de la tenue d’une enquête licite.
  2. L’exigence de conclusion d’un accord ou d’une entente dont il est question à l’alinéa 8(2)f) est importante. Le Commissariat est d’avis qu’il doit exister un accord ou une entente dictant les conditions de communication des renseignements, notamment afin que cette communication soit de portée limitée, qu’elle soit effectuée uniquement à des fins autorisées, que la confidentialité des renseignements soit protégée et que des procédures soient en place pour vérifier l’exactitude des renseignements.
  3. Dans l’entente de coopération conclue entre la GRC et le FBI, il est indiqué que l’utilisation des données du CIPC et du NCIC/III est réservée exclusivement aux organismes d’application de la loi et de justice pénale pour le traitement de dossiers d’application de la loi et de justice pénale.
  4. La GRC ne conteste pas le fait que, pour être autorisée en vertu de l’entente de coopération, la communication des renseignements personnels de la plaignante devait se faire à des fins d’application de la loi ou de justice pénale. Toutefois, elle soutient que les renseignements ont effectivement été communiqués au CBP à des fins d’application de la loi.
  5. Selon les explications de la GRC, de façon générale, quand le CBP procède à une évaluation de l’admissibilité en vertu de l’article 212 de l’INA, il détermine le risque que la personne représente pour la sécurité publique, ce qui peut inclure un examen des renseignements liés à la santé mentale et à des tentatives de suicide. L’article 212 de l’INA fait plus particulièrement référence à une menace pour les biens, la sécurité ou le bien être de l’étranger ou d’autrui (c. à d. qu’il inclut la considération du risque que représente la personne pour elle même ou pour les autres).
  6. La GRC soutient que la communication de renseignements liés à des tentatives de suicide au CBP devrait être considérée comme se faisant à des fins d’application de la loi pour les raisons suivantes :

    [traduction]
    Étant donné que les autorités frontalières ont un mandat général lié à la sécurité publique et au maintien de la paix à la frontière, il est probable que la consultation par le CBP des États Unis de renseignements comportementaux comme ceux relatifs à une menace ou à une tentative de suicide contribue à éviter toute « menace pour les biens, la sécurité ou le bien être de l’étranger ou d’autres personnes ». Il s’agirait donc d’une fin compatible avec celle de la collecte initiale de renseignements essentiels à la sécurité publique. De plus, le rôle des autorités frontalières ne se limite pas à assurer la sécurité du public et le maintien de la paix à la frontière, mais aussi partout aux États Unis. Ainsi, les évaluations de l’admissibilité contribuent à assurer que les personnes qui entrent aux États Unis ne constitueront pas une menace à la sécurité publique une fois entrées.

  7. La GRC est d’avis que les tentatives de suicide peuvent être des indicateurs du danger qu’une personne représente pour elle même ou pour autrui et que la communication de ce type de renseignements cadre avec les obligations en droit commun des policiers, soit le maintien de la paix, la prévention de la criminalité, les enquêtes criminelles et la protection de la vie et des biens, qui sont des composantes essentielles de l’application de la loi et de la justice pénale au sens de l’entente de coopération. La GRC estime donc que la communication de renseignements liés à des tentatives de suicide au CBP par l’intermédiaire du CIPC se fait aux fins de l’application de la loi et de la sécurité publique, conformément à ce que prévoit l’entente de coopération.
  8. Ni l’entente de coopération ni les principes directeurs du CIPC ne définissent le terme « application » de la loi. Bien que les interprétations possibles soient nombreuses, le Commissariat est convaincu, d’après la définition figurant au dictionnaire et la façon dont le terme est défini dans les lois provinciales et territoriales, qu’il ne doit pas être interprété aussi largement que le demande instamment la GRC dans cette affaire, en particulier si l’on tient compte de la nature quasi constitutionnelle de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
  9. À l’appui de cette opinion, le Commissariat fait remarquer que, dans son sens courant, le terme « application de la loi » signifie [traduction] « détecter et punir les infractions à la loi »Note de bas de page 15. De même, le verbe « appliquer » signifie [traduction] « contraindre à l’observation (notamment d’une loi) »Note de bas de page 16.
  10. En anglais, l’expression « enforcement of a law » est différente de l’expression générale « administering a law », qui renvoie aux actions relatives à la mise en œuvre d’une loiNote de bas de page 17. La version anglaise de l’alinéa 8(2)f) utilise les termes « enforcing » et « administering », tandis que l’entente de coopération prévoit une communication à des fins exclusives d’« application de la loi » et de « justice pénale », ce qui donne clairement à penser que la portée de la communication en vertu de l’entente de coopération devait être plus limitée.
  11. Plusieurs lois provinciales en matière de protection des renseignements personnels dans le secteur public définissent aussi le terme « exécution de la loi » [law enforcement] de manière tout aussi limitée. Au paragraphe 2(1) de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée de l’Ontario, par exemple, il est défini comme suit :

    « exécution de la loi » s’entend, selon le cas :
    1. du maintien de l’ordre,
    2. des enquêtes ou inspections qui aboutissent ou peuvent aboutir à des instances devant les tribunaux judiciaires ou administratifs, si ceux ci peuvent imposer une peine ou une sanction à l’issue de ces instances,
    3. de la tenue des poursuites visées à l’alinéa b).
    Cette définition est tout à fait compatible avec celle des lois provinciales et territoriales employant ce terme.
  12. Dans son enquête, la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario a conclu que, de manière générale, les autorités frontalières des États Unis n’utilisaient pas les renseignements liés aux tentatives de suicide à des fins d’« exécution de la loi » au sens de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée. Selon elle, les autorités frontalières des États Unis se servaient de ces renseignements principalement pour contrôler les personnes souhaitant voyager aux États Unis ou transiter par ce pays. Faute de situations particulières soulevant des préoccupations quant à la sécurité d’un agent ou du public, en application du critère de communication de renseignements sur la santé mentale, la commissaire a conclu que le contrôle des voyageurs ne constituait pas une fin de « maintien de l’ordre ». Qui plus est, ce type de contrôle n’a donné lieu à aucune procédure judiciaire ou quasi judiciaire à l’issue de laquelle une peine ou une sanction aurait pu être imposée.
  13. Pour des raisons similaires, le Commissariat estime que la communication des renseignements personnels de la plaignante ne s’est pas faite à des fins d’« application de la loi » ou de « justice pénale », comme l’exige l’entente de coopération. Rien en l’espèce ne laisse entendre que la plaignante avait enfreint la loi ou autrement omis de suivre les procédures dans sa demande d’admission aux États Unis. Elle a simplement été interdite de territoire pour des motifs liés à la santé et s’est fait dire que si elle voulait présenter une nouvelle demande d’admission, elle devrait se soumettre à un examen médical. Il n’y avait pas de peine ni de sanction en jeu. En fait, selon la Loi sur le précontrôle, L. C. 1999, c. 20, qui régit les pouvoirs des agents du CBP travaillant dans des aéroports canadiens, il ne semble pas qu’une sanction ou une peine aurait pu être imposée par un agent du CBP dans les circonstances.
  14. Ceci étant, le Commissariat conclut que la communication des renseignements personnels de la plaignante n’était pas conforme aux exigences de l’alinéa 8(2)f).
  15. Le Commissariat partage l’avis de la GRC selon lequel, dans certaines circonstances, la communication de renseignements relatifs à une tentative de suicide pourrait cadrer avec les obligations en droit commun des policiers, soit le maintien de la paix, la prévention de la criminalité, les enquêtes criminelles et la protection de la vie et des biens. Cependant, il estime que l’évaluation de l’admissibilité à laquelle a procédé le CBP dans les circonstances ne cadrait pas avec de telles fins, puisque rien n’indiquait que la plaignante représentait une menace pour la sécurité publique.
  16. Compte tenu de cette conclusion, le Commissariat croit que, de manière générale, le CBP ne devrait pas avoir accès à des renseignements sur les tentatives de suicide de Canadiens ne pouvant pas raisonnablement être considérés comme représentant un risque pour la sécurité publique, ce qui comprend les entrées IPP et les indicateurs de mise en garde. La position du Commissariat rejoint celle de la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario, qui a conclu qu’une tentative de suicide ne pouvait être considérée comme soulevant des préoccupations en matière de sécurité publique que lorsqu’elle impliquait des menaces sérieuses, des actes violents ou un risque grave de se faire du mal en tentant de provoquer une intervention mortelle de la police ou de se suicider sous garde policière.

B) LA COMMUNICATION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS DE LA PLAIGNANTE AU CBP ÉTAIT-ELLE AUTORISÉE EN VERTU DE L’ALINÉA 8(2)a) DE LA LOI?

  1. La GRC soutient également que la communication de renseignements liés à des tentatives de suicide est autorisée en vertu de l’alinéa 8(2)a) de la Loi puisqu’il existe un [traduction] « lien direct et raisonnable avec les fins auxquelles les renseignements ont initialement été recueillis (c. à d. des fins de justice pénale, y compris d’application de la loi) ».
  2. Le Commissariat est d’avis que l’appréciation s’appliquant à l’entente de coopération s’applique aussi à l’alinéa 8(2)a) de la Loi. Il a conclu précédemment que la communication au CBP de renseignements personnels liés à des tentatives de suicide n’était pas autorisée en vertu de l’entente de coopération et ne voit pas en quoi l’utilisation de ces renseignements par le CBP pour évaluer l’admissibilité aux États Unis cadre avec les fins pour lesquelles ils ont été recueillis.
  3. Le Commissariat constate que la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario s’est aussi penchée sur la question de savoir si l’utilisation de ce type de renseignements par le CBP pouvait être considérée comme cadrant avec les fins auxquelles ils ont été recueillis. Selon la commissaire, les renseignements que recueillent les services de police sur les tentatives de suicide servent avant tout à documenter leur rôle lors de l’incident, pour leurs propres dossiers locaux, ce qui est tout à fait légitime. En d’autres circonstances, la collecte de ces renseignements peut également servir aux fins suivantes :
    1. aider les agents à déterminer les interventions et mesures appropriées lorsqu’ils répondent à un appel de service;
    2. déterminer les interventions et mesures appropriées pour les personnes susceptibles de se trouver sous garde policière;
    3. protéger le public, les policiers et la personne elle même.
  4. Le Commissariat souscrit à cette analyse et estime que les deux premières fins ne s’appliquent qu’aux services de police qui traitent avec la personne en question dans l’exercice de leurs activités de maintien de l’ordre. Seule la troisième fin pourrait s’appliquer à la communication de renseignements au CBP, mais seulement si l’on peut raisonnablement considérer que les tentatives de suicide passées de la personne visée par les renseignements indiquent qu’elle représente un risque pour les autres, ce qui n’était pas le cas de la plaignante. Faute d’un risque pour les autres, le Commissariat est d’avis qu’une personne ne s’attendrait pas raisonnablement à ce que des renseignements liés à une tentative de suicide recueillis par un organisme d’application de la loi soient utilisés par les autorités frontalières des États Unis aux fins d’une évaluation de l’admissibilité.
  5. Par conséquent, le Commissariat conclut que la communication des renseignements personnels de la plaignante n’était pas autorisée en vertu de l’alinéa 8(2)a) parce que l’utilisation de ces renseignements par le CBP à des fins d’évaluation de l’admissibilité n’était pas compatible avec les fins auxquelles ils ont été recueillis ou consignés par le SPT.

C) LES PRINCIPES DIRECTEURS DU CIPC ÉTAIENT ILS SUFFISANTS POUR PROTÉGER ADÉQUATEMENT LA PLAIGNANTE CONTRE LA COMMUNICATION DE SES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS AU CBP?

  1. Le Commissariat, qui a conclu précédemment que la communication des renseignements personnels de la plaignante au CBP n’était pas autorisée en vertu des alinéas 8(2)a) et 8(2)f) de la Loi, est également d’avis que les principes directeurs du CIPC en vigueur à l’époque des faits n’étaient pas suffisamment clairs pour offrir une protection suffisante contre une telle communication.
  2. Le Commissariat reconnaît que, même si la GRC est l’entité responsable du CIPC, elle ne prend aucune décision unilatérale relativement aux fonctionnalités et aux principes directeurs du système. Néanmoins, en tant que signataire de l’entente de coopération avec le FBI, elle a pour responsabilité de s’assurer que la communication de renseignements aux autorités des États Unis se fait dans le respect de l’entente de coopération, afin que tout soit conforme à la Loi. Comme les principes directeurs du CIPC constituent le principal moyen d’assurer la conformité à l’entente de coopération, la GRC doit aussi en assumer la responsabilité.
  3. Les principes directeurs en vigueur lorsque les renseignements personnels de la plaignante ont été utilisés par le CBP ne comprenaient aucune directive particulière précisant quand un indicateur de mise en garde pour tendances suicidaires pouvait ou devait être ajouté au CIPC. Ils n’expliquaient pas non plus adéquatement dans quelles circonstances un organisme contributeur pouvait ou non faire une entrée IPP liée à la santé mentale. Les principes directeurs permettaient la communication de renseignements sur des personnes souffrant d’un [traduction] « apparent trouble émotionnel ou de santé mentale », ce qui, de l’avis du Commissariat, était beaucoup trop large et ne cadrait pas avec les exigences prévues dans l’entente de coopération.
  4. Le Commissariat est d’avis que les principes directeurs du CIPC auraient dû limiter la communication de renseignements liés à des tentatives de suicide aux autorités des États Unis, y compris les autorités frontalières, uniquement aux cas dans lesquels la personne en question pouvait raisonnablement être considérée comme représentant une menace continue pour autrui. Ils auraient aussi dû contenir une directive détaillée expliquant comment prendre une telle décision.
  5. En ce qui concerne les changements apportés au CIPC au cours de l’enquête, le Commissariat a examiné en détail les manuels révisés et a constaté que plusieurs sections des nouvelles versions du manuel de l’utilisateur et du manuel des principes directeurs n’étaient pas uniformes. Bien que le Commissariat se réjouisse du fait que la GRC ait pris des mesures pour retirer complètement du CIPC les indicateurs de mise en garde relatifs aux tendances suicidaires et à la santé mentale, il est préoccupé par le fait que les principes directeurs du CIPC soient toujours nébuleux et ne fournissent pas suffisamment de directives aux organismes contributeurs relativement à ce qui doit être inclus dans les nouvelles entrées IPP-CO liées à des tentatives de suicide et aux circonstances dans lesquelles ces entrées peuvent ou devraient être rendues accessibles aux autorités des États Unis.
  6. Le Commissariat est également préoccupé par le fait que, par défaut, le nouveau champ « COMMUNIQUER AUX É. U. » soit configuré de manière à autoriser la communication des renseignements aux autorités des États Unis et que les organismes associés au CIPC aient à choisir délibérément de limiter leur communication aux organismes canadiens en indiquant « Non » dans le champ « COMMUNIQUER AUX É.-U. ».

Rapport de conclusions préliminaire

  1. Après avoir examiné les changements au CIPC apportés par la GRC, changements décrits dans la lettre du commissaire de la GRC datée de septembre 2014, le Commissariat a fourni à la GRC, en juillet 2015, un rapport de conclusions préliminaire, lui offrant par la même occasion la possibilité de donner suite à ses recommandations préliminaires. Les recommandations étaient fondées sur les conclusions du Commissariat relativement aux dimensions personnelle et systémique des plaintes ainsi que sur son analyse des changements au CIPC mis en œuvre par la GRC au cours de l’enquête.
  2. Plus particulièrement, le Commissariat a recommandé à la GRC de réviser encore une fois les principes directeurs du CIPC afin de fournir aux organismes contributeurs des directives détaillées leur permettant d’établir dans quelles circonstances une personne ayant menacé ou tenté de se suicider peut être considérée comme représentant un risque continu pour la sécurité publique, notamment des exemples qui les aideraient à déterminer quand il convient d’exercer leur pouvoir discrétionnaire relatif à la communication de renseignements liés à la santé mentale ou à des tentatives de suicide.
  3. Dans le même ordre d’idée, le Commissariat a aussi recommandé que ces révisions tiennent compte du fait que l’utilisation des renseignements liés aux tentatives de suicide ou à la santé mentale par les autorités des États Unis ne devrait être autorisée par l’organisme contributeur que lorsqu’il est établi que la collecte vise une fin claire d’application de loi ou de sécurité publique, comme l’exige l’entente de coopération, et que les renseignements en question sont clairement pertinents à cette fin.
  4. En réponse au rapport de conclusions préliminaire et aux recommandations du Commissariat, la GRC a rappelé les trois concepts généraux qui, selon elle, sont fondamentaux pour l’administration du CIPC :

    [traduction]
    1. Bien que le CIPC soit exploité sous l’égide des Services nationaux de police de la GRC, tous les organismes policiers et partenaires de sécurité publique du Canada, y compris la Division de la police criminelle de la GRC, contribuent activement à son développement et à son orientation stratégique. Cette collaboration et les consultations qui en découlent font en sorte que le CIPC reflète avec exactitude les besoins du milieu élargi de la justice pénale, à l’échelle tant nationale qu’internationale.
    2. Les organismes contributeurs sont responsables des renseignements qu’ils saisissent dans le CIPC, y compris de leur exactitude et du respect de toutes les lois et de tous les principes directeurs qui y sont associés, notamment les principes directeurs du CIPC, mais peut être plus important encore, les lois et politiques provinciales, municipales et internes.
    3. La principale fonction du CIPC consiste à communiquer des renseignements aux intervenants du milieu de la justice pénale afin de leur permettre de remplir leurs obligations de maintien de la paix, de prévention de la criminalité, de réalisation d’enquêtes criminelles et de protection de la vie et des biens.
  5. La GRC a refusé d’apporter d’autres changements aux principes directeurs et aux fonctionnalités du CIPC à la suite de nos recommandations.

MISE À JOUR DE L’ENTENTE DE COOPÉRATION AVEC LE FBI

  1. Bien que la GRC ait refusé d’apporter d’autres changements au CIPC et aux principes directeurs du système, elle a mis à jour son entente de coopération avec le FBI, qui a été signée par les deux parties le 27 octobre 2015. L’entente contient maintenant des références précises aux cadres constitutionnels et juridiques de protection des renseignements personnels respectifs du Canada et des États Unis. Elle comprend aussi les définitions suivantes, qui sont particulièrement pertinentes dans le contexte de la présente analyse :

    [traduction]
    « Fins de justice pénale » s’entend de l’exécution de l’une ou l’autre des activités suivantes : repérage, arrestation, détention, libération conditionnelle, libération après procès, poursuite, jugement, surveillance correctionnelle ou réhabilitation d’accusés ou de criminels. L’administration de la justice pénale doit comprendre des activités d’identité judiciaire ainsi que la collecte, le stockage et la diffusion de renseignements contenus dans des dossiers d’antécédents criminels.

    « Organisme de justice pénale » s’entend d’une institution gouvernementale ou de toute sous unité de cette institution qui est chargée de l’administration de la justice pénale en vertu d’une loi, du droit commun ou d’un décret loi et qui consacre une partie importante de son budget annuel à l’administration de la justice pénale.

  2. L’entente de coopération mise à jour contient également un nouveau libellé relativement à la communication et à l’utilisation de renseignements en vertu de l’entente :

    [traduction]
    Conformément aux principes directeurs du CIPC et du NCIC/III, l’utilisation des renseignements contenus dans ces systèmes est réservée aux organismes de justice pénale, à des fins de justice pénale ou pour un usage compatible avec ces fins. Pour faire suite à la définition de « fins de justice pénale », les organismes d’application de la loi et de justice pénale doivent utiliser les données du CIPC et du NCIC/III exclusivement dans le cadre d’activités d’application de la loi et de justice pénale comme les enquêtes de renseignement et de lutte contre le terrorisme.

  3. La nouvelle entente de coopération définit ainsi le concept d’« usage compatible » : [traduction] « usage ayant un lien direct et raisonnable avec les fins auxquelles les renseignements ont été initialement recueillis ou compilés ».
  4. De l’avis du Commissariat, en l’absence d’un risque pour un agent ou pour la sécurité publique, la mention d’un usage compatible ne justifierait pas la communication de renseignements liés à une tentative de suicide aux autorités frontalières des États-Unis. Selon l’entente de coopération mise à jour, pour qu’un usage soit considéré comme compatible, il doit être lié de façon directe et raisonnable avec les fins auxquelles les renseignements ont été initialement recueillis ou compilés. La Cour suprême du Canada a déclaré que, aux fins de l’application de la Loi, un usage peut être compatible si une personne peut « raisonnablement s’attendre » à ce que les renseignements soient utilisés de cette manièreNote de bas de page 18.
  5. Comme il l’a mentionné dans son analyse relative à l’alinéa 8(2)a), le Commissariat ne croit pas qu’une personne puisse raisonnablement s’attendre à ce que des renseignements liés à une tentative de suicide, c’est à dire des renseignements de nature très délicate recueillis par les services de police canadiens dans le cadre d’activités de maintien de l’ordre, soient ensuite utilisés par les autorités frontalières des États Unis pour l’interdire de territoire. Lorsque les renseignements ne témoignent pas d’un risque continu pour la sécurité publique, leur utilisation par les autorités frontalières des États Unis à des fins d’évaluation du statut de visiteur n’est pas directement ni raisonnablement liée aux fins auxquelles les renseignements ont été initialement recueillis.

MISE À JOUR DES PRATIQUES DU SPT

  1. Le SPT a aussi apporté des changements à ses pratiques. En juillet 2015, le chef du SPT a présenté à la Commission des services policiers de Toronto (CSPT) un rapport sur la communication de renseignements liés aux tentatives et aux menaces de suicide au Service des douanes et de la protection des frontières des États Unis par l’intermédiaire du CIPCNote de bas de page 19. Ce rapport avait pour but de faire le point avec la CSPT sur les nouvelles pratiques recommandées par le SPT et de décrire en quoi ces pratiques peuvent être comparées aux recommandations de la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario.
  2. Le rapport présente les considérations suivantes, qui ont guidé les changements apportés par le SPT à ses pratiques de communication, par l’intermédiaire du CIPC, de renseignements liés à des tentatives ou à des menaces de suicide :

    [traduction]
    • Bien que la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario recommande aux services de police de l’Ontario de limiter la création de certaines d’entrées IPP, le SPT est d’avis que de restreindre l’accès du CBP des États Unis à certaines entrées IPP constitue la meilleure solutionNote de bas de page 20.
    • À moins que ne s’applique l’une ou l’autre des circonstances associées au critère de communication de renseignements sur la santé mentale, le SPT choisira de ne pas communiquer ses entrées IPP CO avec les autorités des États Unis, y compris ses autorités frontalières, au moyen de la fonction « COMMUNIQUER AUX É. U. » du CIPC.
    • L’examen relatif au renouvellement d’une entrée IPP liée à une tentative ou à une menace de suicide est maintenant effectué aux deux ans plutôt qu’aux cinq ans. Cet examen se fonde en partie sur le temps écoulé, l’âge de la personne au moment de l’incident et d’autres renseignements pertinents et importants, ainsi que sur les circonstances associées au critère de communication de renseignements sur la santé mentale.
    • Le SPT a mis en place un processus de réexamen permettant à une personne de faire retirer du CIPC une entrée IPP CO liée à une tentative ou à une menace de suicide en présentant une demande au gestionnaire des services de gestion des dossiers du SPTNote de bas de page 21. Il y a eu recours pour plusieurs personnes s’étant vu interdites de territoire aux États Unis en raison d’entrées IPP liées à la santé mentale créées par le SPT, y compris la plaignante dans cette affaire.
  3. Les changements ont été apportés en août 2015. Dans le cadre de la mise en œuvre de ces nouvelles pratiques, le SPT a procédé à un examen de ses propres entrées IPP en fonction des circonstances associées au critère de communication de renseignements sur la santé mentale ainsi que du temps écoulé, de l’âge de la personne au moment de l’incident et d’autres renseignements pertinents et importants. À la suite de cet examen, il a supprimé 9 766 des 15 180 entrées IPP qu’il avait saisies dans le CIPC relativement à une menace ou à une tentative de suicide.
  4. La plaignante a confirmé que le SPT avait communiqué avec elle et l’avait informée qu’à la suite d’un examen, l’indicateur de mise en garde et les entrées IPP concernant sa tentative de suicide avaient été supprimés du CIPCNote de bas de page 22.

Conclusions et recommandations finales

  1. Pour les raisons énoncées dans le présent rapport, le Commissariat estime que les dimensions personnelle et systémique des plaintes sont fondées. La communication des renseignements personnels de la plaignante n’était autorisée ni en vertu de l’alinéa 8(2)f) ni en vertu de l’alinéa 8(2)a) de la Loi.
  2. Conformément à l’alinéa 35(1)b) de la Loi, le 15 décembre 2016, le Commissariat a présenté ses conclusions et ses recommandations finales à la GRC et lui a demandé de lui faire part de toute nouvelle mesure prise ou proposée pour donner suite aux recommandations :

    [traduction]
    1. La fonction « COMMUNIQUER AUX É. U. » du CIPC devrait être configurée de manière à mettre fin à la communication par défaut, aux autorités frontalières des États Unis, des entrées IPP CO liées à des menaces ou à des tentatives de suicide.
    2. La GRC devrait réviser les principes directeurs du CIPC afin de fournir des directives claires, cohérentes et précises qui permettront de veiller à ce que les renseignements liés à des tentatives de suicide soient communiqués aux autorités frontalières des États Unis uniquement lorsque la personne peut être raisonnablement considérée comme représentant un risque continu pour les autres. Le Commissariat a fourni à la GRC des exemples précis de principes directeurs du CIPC qui, selon lui, sont nébuleux et/ou incohérents.
  3. À cet égard, le Commissariat encourage fortement la GRC à s’inspirer, pour la révision des principes directeurs du CIPC, des lignes directrices mises en œuvre par le SPT, qui intègrent le critère de communication de renseignements sur la santé mentale et établissent une période de conservation des dossiers plus limitée. Il est d’avis que ces lignes directrices limitent clairement la communication aux autorités frontalières des États Unis des entrées IPP CO liées à une tentative de suicide aux circonstances dans lesquelles la personne peut raisonnablement être considérée comme représentant un risque pour autrui. De plus, le Commissariat estime que l’exigence selon laquelle les organismes associés au CIPC doivent examiner chacune de leurs entrées IPP CO afin d’en déterminer la pertinence après deux ans plutôt qu’après cinq ans constitue une pratique beaucoup plus raisonnable de conservation des dossiers.

Réponse de la GRC aux conclusions et aux recommandations du Commissariat

  1. Dans une lettre datée du 31 janvier 2017, la GRC a fait savoir qu’elle n’était d’accord ni avec les conclusions du Commissariat ni avec ses recommandations. De manière générale, elle se dit d’avis que [traduction] « le rapport de conclusions n’aborde pas le devoir crucial et le rôle de la police de protéger les gens, y compris d’eux-mêmes ».
  2. Le Commissariat croit qu’il est important de rappeler que, dans la description de la portée de son enquête au paragraphe 30 du présent rapport, il a reconnu l’importance du CIPC pour le maintien de l’ordre en tant qu’outil national de communication de renseignements permettant aux partenaires d’application de la loi et de sécurité publique de travailler ensemble de manière efficace. Il convient que, dans certaines circonstances, la communication de renseignements liés à une tentative de suicide peut cadrer avec les obligations en droit commun des policiers de maintenir la paix, de prévenir la criminalité, de mener des enquêtes criminelles et de protéger la vie et les biens. Toutefois, l’enquête du Commissariat était axée uniquement sur la question précise de savoir si la communication au CBP de renseignements personnels liés à une tentative de suicide par l’intermédiaire du CIPC était autorisée en vertu de la Loi.
  3. La GRC n’est pas d’accord avec la conclusion du Commissariat selon laquelle la communication au CBP n’était pas autorisée en vertu de l’article 8 de la Loi pour les raisons suivantes :

    [traduction]
    Votre analyse […] cherche à exclure le Service des douanes et de la protection des frontières (CBP) des États Unis des organismes d’application de la loi, aboutissant, au paragraphe 81, à une conclusion qui semble laisser croire qu’une personne doit représenter une menace à la sécurité publique (et non seulement présenter un schéma comportemental établi constituant une menace pour elle-même) afin que des renseignements sur ses tentatives de se faire du mal puissent être communiqués au CBP.

    Selon toute évaluation, mesure ou interprétation raisonnable, le CBP des États Unis constitue un organisme d’application de loi. Je ne peux par ailleurs pas accepter votre analyse ni vos conclusions […].

  4. Par souci de clarté, le Commissariat reconnaît que le CBP a le pouvoir d’exécuter les lois états uniennes relatives aux douanes et à l’immigrationNote de bas de page 23. Il convient donc que le CBP peut être considéré comme un « organisme d’application de la loi et de justice pénale » aux fins de l’entente de coopération. Toutefois, après analyse (voir les paragraphes 73 à 80 du présent rapport), le Commissariat estime que l’utilisation par le CBP des renseignements personnels de la plaignante liés à sa tentative de suicide à des fins d’évaluation de l’admissibilité ne s’est pas faite dans le cadre d’activités d’application de la loi ou de justice pénale, comme l’exige l’entente de coopération.
  5. Malgré le désaccord de la GRC, le Commissariat est toujours d’avis que la communication au CBP de renseignements liés à des tentatives de suicide dans les circonstances abordées dans le présent rapport n’est pas autorisée en vertu de l’article 8 de la Loi.
  6. En réponse aux recommandations du Commissariat relatives aux principes directeurs du CIPC, la GRC a déclaré ce qui suit :

    [traduction]
    […] nous convenons que les principes directeurs et procédures se rapportant au CIPC doivent toujours fournir des directives et des orientations claires. C’est pourquoi la GRC continue de les examiner et de les mettre à jour de façon régulière pour en assurer l’uniformité et la clarté, en consultation avec le CCSNIP. Ces principes directeurs présentent une directive claire quant aux conditions à respecter pour la création d’un dossier de catégorie « CO », directive qui s’harmonise à l’esprit du critère de communication de renseignements sur la santé mentale décrit dans votre rapport.

  7. Le Commissariat est heureux que la GRC et le Comité consultatif sur les services nationaux d’information policière (CCSNIP) aient examiné et mis à jour les principes directeurs et les procédures se rapportant au CIPC. Il estime toutefois que, tels qu’ils sont formulés actuellement, les principes directeurs du CIPC ne sont toujours pas conformes à l’esprit du critère de communication de renseignements sur la santé mentale. Le Commissariat a fourni à la GRC plusieurs exemples à l’appui de sa position. Dans leur forme actuelle, les principes directeurs du CIPC semblent laisser à la discrétion des organismes contributeurs la décision de communiquer ou non au CBP les renseignements liés à des tentatives de suicide, même lorsqu’aucune fin claire d’application de la loi ou de sécurité publique n’a été établie. De l’avis du Commissariat, de telles communications ne seraient pas autorisées en vertu de l’article 8 de la Loi.
  8. La GRC a également fourni les précisions suivantes au Commissariat relativement aux politiques actuelles en matière de conservation des entrées IPP CO :

    [traduction]
    Votre rapport laisse entendre que chaque organisme contributeur devrait revoir après deux ans plutôt qu’après cinq ans la période de conservation des entrées IPP CO, afin d’assurer la pertinence de ces dernières. Cependant, il n’explique pas que les organismes contributeurs reçoivent actuellement un rapport de validation mensuel pour tous les dossiers consignés dans le CIPC depuis plus de 12 mois. Ces rapports servent à rappeler aux organismes qu’ils doivent procéder à des examens périodiques pour valider la pertinence et l’exactitude de ces dossiers. Les entrées de type « CO » peuvent ensuite être mises à jour ou supprimées, à la discrétion de l’organisme contributeur.

  9. Le Commissariat a examiné les principes directeurs actuels de la GRC se rapportant aux entrées IPP (section 1.10 du manuel de l’utilisateur) et confirmé que les organismes contributeurs doivent effectivement examiner chaque entrée et en déterminer la pertinence après 12 mois, ce qui constitue à son avis une pratique acceptable :

    [traduction]
    Après sa saisie initiale, un dossier IPP est validé tous les 12 mois, validation à l’occasion de laquelle il fait l’objet d’un examen permettant de déterminer si l’information qu’il contient est toujours valide, exacte et pertinente. Lorsque le dossier figure au rapport d’élimination, l’organisme contributeur doit l’examiner et s’assurer qu’il demeure pertinent avant d’en repousser la date d’expiration.

  10. Malgré son désaccord quant à la configuration par défaut de la fonction « COMMUNIQUER AUX É. U. » dans le CIPC ainsi qu’à la clarté et à la cohérence des principes directeurs concernant l’utilisation des entrées IPP-CO, le Commissariat se réjouit du nombre d’entrées liées à la santé mentale et/ou à des tentatives de suicide qui ont été supprimées du CIPC. Comme il est mentionné au paragraphe 105 du présent rapport, le SPT a supprimé 9 766 entrées en lien avec une menace ou une tentative de suicide sur un total de 15 180.
  11. Selon la GRC, lorsqu’elle a introduit la catégorie « IPP CO » et changé ses principes directeurs en mai 2015 :

    [traduction]
    Les organismes devaient aussi supprimer du CIPC toute référence à la santé mentale ou au suicide. Depuis, il y a eu une diminution notable du nombre de dossiers contenant des entrées de catégories « SM » ou « S », qui est passé d’environ 100 000 en novembre 2014 à 3 500 en décembre 2016. La GRC continue de collaborer avec les organismes contributeurs en vue d’éliminer les entrées de catégories « SM » et « S ». Il est à noter que, avec le remplacement des catégories « SM » et « S » par la catégorie « CO », seules environ 16 000 entrées « CO » ont été ajoutées (les entrées « CO » comprennent plusieurs types différents de renseignements sur la sécurité publique).

  12. Il s’agit certainement là d’un pas dans la bonne direction. Toutefois, afin de mieux comprendre comment les organismes associés au CIPC interprètent les principes directeurs actuels du CIPC concernant l’utilisation et la communication de renseignements liés à des menaces ou à des tentatives de suicide, le Commissariat invite la GRC à lui présenter, d’ici un an, des chiffres à jour concernant l’utilisation des entrées IPP CO.

Conclusions

  1. Au cours de l’enquête du Commissariat, la GRC a continué de soutenir que le critère de communication de renseignements sur la santé mentale de la commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario était de portée trop restreinte, en ce sens qu’il requiert l’existence d’une menace de violence et ne permet pas la communication de renseignements sur une personne considérée comme présentant un risque continu pour elle même. Le Commissariat estime que très peu de renseignements liés la santé mentale et/ou au risque de suicide d’une personne peuvent être communiqués aux autorités frontalières des États Unis, et uniquement dans des circonstances où la personne peut raisonnablement être considérée comme représentant un risque pour un agent ou la sécurité publique.
  2. Le Commissariat fonde sa conclusion selon laquelle la tentative de suicide de la plaignante ne soulevait aucune préoccupation en matière de sécurité publique sur le fait que le SPT a depuis supprimé l’entrée au CIPC liée à cette tentative de suicide, après un réexamen de son approche relative aux renseignements liés au suicide.
  3. Le Commissariat est d’avis que les principes directeurs du CIPC se rapportant aux tentatives de suicide étaient nébuleux à l’époque où la plaignante s’est vue interdite de territoire aux États Unis et qu’ils le sont toujours. Une directive plus concrète doit être établie afin de prévenir le recours à des pratiques systématiques et incohérentes de communication de renseignements personnels liés au suicide aux autorités frontalières des États Unis. Le Commissariat estime que, en tant que service de police national du Canada et signataire de l’entente de coopération, la GRC est la mieux placée pour fournir une directive claire et précise aux organismes associés au CIPC à cet égard.
  4. Grâce à l’ajout de la fonction « COMMUNIQUER AUX É. U. », il est maintenant possible pour la GRC de tenir compte, dans ses directives, des circonstances dans lesquelles les autorités des États Unis, y compris ses autorités frontalières, devraient se voir accorder l’accès à certains renseignements. Cependant, le Commissariat n’est pas d’accord sur le fait que cette fonction soit configurée de manière à ce que les entrées SIP CO liées à des tentatives de suicide soient communiquées par défaut aux autorités frontalières des États Unis. Il estime que, pour la GRC, l’option la plus appropriée consisterait à éliminer cette configuration par défaut et à établir des principes directeurs décrivant clairement dans quel contexte les organismes associés au CIPC peuvent choisir de communiquer des renseignements aux autorités frontalières des États Unis. Il croit que la communication par défaut introduit un risque important que des renseignements personnels de nature délicate liés à la santé mentale soient transmis par inadvertance de l’autre côté de la frontière, d’une manière que la Loi n’autorise pas.

Autres

  1. Lors de son enquête, le Commissariat a rencontré des représentants de l’Association des psychiatres du Canada (APC) afin de discuter des préoccupations de celle ci relativement à la communication de renseignements sur des tentatives de suicide aux autorités frontalières des États Unis par l’intermédiaire du CIPC. À la suite de cette rencontre, le Commissariat a invité la GRC à participer à une discussion avec l’APC relativement à cette question. La GRC a décliné l’invitation, mais le directeur général du Centre d’IPC a indiqué que la GRC aimerait rencontrer l’APC ou d’autres intervenants en santé mentale en dehors de la portée de l’enquête.
  2. Nous encourageons donc fortement la GRC à consulter des professionnels et des associations du domaine de la santé mentale lors de la révision des principes directeurs du CIPC en lien avec les entrées IPP CO.
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