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Comparution devant le Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités (TRAN) concernant son étude sur les véhicules automatisés et branchés au Canada

Le 9 mai 2018
Ottawa (Ontario)

Déclaration de Daniel Therrien,
Commissaire à la protection de la vie privée du Canada

(Le texte prononcé fait foi)


Introduction

Merci Madame la présidente et honorables membres du Comité de m’avoir invité à témoigner devant vous aujourd’hui dans le cadre de l’étude sur les véhicules automatisés et branchés au Canada.

Types de données concernant les véhicules autonomes et connectés

Les véhicules modernes sont plus qu’un simple moyen de transport. Ils sont devenus des téléphones intelligents sur roues — ce sont des réseaux de capteurs mobiles qui peuvent recueillir des renseignements concernant leurs propres systèmes internes, ceux d’autres véhicules sur la route et l’infrastructure locale, et communiquer avec eux. Ces renseignements ne se rapportent pas exclusivement au véhicule lui-même. Ils peuvent porter sur le conducteur ou les passagers et servir à dégager des tendances ou à faire des déductions au sujet de ces personnes à plusieurs fins qui ne se rapportent pas toutes à la sécurité des transports. Par exemple, ces véhicules recueillent des renseignements sur les habitudes et les comportements des conducteurs, la biométrie et la santé, l’emplacement, les contacts personnels, les horaires et les communications, et le contenu lié au divertissement qui pourraient servir entre autres à des fins de marketing, d’établissement d’un contrat d’assurance fondé sur l’usage ou de navigation.

La plupart des flux de données des véhicules connectés sont très complexes et ils ne sont pas transparents. Les gens sont habitués de simplement s’installer derrière le volant et conduire. Il est possible qu’ils ne soient guère au courant de la manière dont les données saisies par un véhicule connecté seront utilisées en arrière-plan et encore moins de leur incidence. Ils ne connaissent peut-être pas non plus les options à leur disposition pour limiter, désactiver ou contrôler d’une façon quelconque ces mécanismes.  

L’arrivée des véhicules connectés et autonomes peut présenter des avantages considérables pour les Canadiens. Mais ces technologies ne pourront se mériter la confiance des consommateurs que lorsqu’un juste équilibre sera atteint entre le flux d’information et la protection de la vie privée.

Consentement valable et démonstration de la responsabilité

Au cours des dernières années, le Commissariat s’est donné pour but de déterminer les améliorations à apporter au modèle de consentement actuel en vertu de la loi fédérale sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Cet exercice a permis d’établir clairement que les personnes souhaitent être en mesure de prendre des décisions au sujet de leurs données. Il a également permis d’établir que les organisations doivent trouver une façon de mieux expliquer ce qu’elles entendent faire avec les renseignements qu’elles recueillent. Afin d’améliorer la situation, nous avons publié une mise à jour de nos Lignes directrices en matière de consentement en ligne qui énonce sept principes directeurs pour obtenir un consentement valable.

En ce qui concerne les véhicules connectés, il pourrait être inapproprié que le conducteur contrôle la façon dont l’information est utilisée dans certains cas, par exemple lorsque les données servent à assurer la sécurité routière ou le bon fonctionnement du véhicule. Toutefois, dans de nombreuses autres situations, le choix individuel devrait prévaloir. Le cas échéant, nous estimons que nos lignes directrices sur le consentement seront utiles.

Bien que nous soyons d’avis que le consentement valable et éclairé continue de jouer un rôle important dans la protection de la vie privée, il est également évident que le modèle de consentement est mis à l’épreuve par ce nouveau contexte où les flux de données et les modèles d’affaires sont de plus en plus complexes.   

Dans de telles situations, comme c’est manifestement le cas avec les véhicules connectés, d’autres mécanismes doivent venir appuyer le consentement, y compris les codes de pratiques à l’intention de l’industrie, la protection de la vie privée à l’étape de la conception et une grande responsabilité et un respect accru du droit à la vie privée de la part des organisations.

En outre, il faudrait appliquer proactivement la loi pour assurer un examen indépendant du respect de ces exigences et obliger les organisations à rendre des comptes. Le moment est venu de mettre rapidement en place des lois plus modernes en matière de protection des renseignements personnels pour nous protéger en tant que citoyens et consommateurs. Je demande que des modifications soient apportées à la loi de manière à permettre au Commissariat, à titre de tiers indépendant, de se rendre dans une organisation et de vérifier si cette dernière respecte les principes de protection de la vie privée, et ce, sans devoir au préalable soupçonner qu’il y a eu violation de la loi. Il ne s’agit pas de pouvoirs extraordinaires, mais plutôt de pouvoirs qu’exercent depuis longtemps d’autres organismes de réglementation.

Une plus grande responsabilité des organisations et une application plus proactive des lois en matière de protection des renseignements personnels sont nécessaires pour protéger efficacement la vie privée dans un monde technologique complexe.

Conclusion

Pour conclure, j’aimerais mentionner l’étude du Comité sénatorial permanent des transports et des communications sur ce sujet. J’ai trouvé encourageant le rapport du Comité sénatorial qui a accordé une grande importance aux questions de protection de la vie privée que nous avions soulevées au cours de son étude et a formulé quatre recommandations axées sur la protection de la vie privée. Je note en particulier sa recommandation no 8, qui réitère ma recommandation voulant que la loi soit modifiée pour donner au Commissariat « le pouvoir d’enquêter de façon proactive sur le respect de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques par l’industrie et de faire observer la Loi »Note de bas de page 1, ainsi que sa recommandation no 10 visant à réunir les intervenants concernés afin d’élaborer un cadre coordonné pour les véhicules connectés, dont la protection de la vie privée serait l’une des principales considérationsNote de bas de page 2. J’attends avec impatience la réponse du gouvernement à ce rapport et j’espère continuer à jouer un rôle clé dans les orientations futures.

Mobiliser et éduquer les consommateurs afin qu’ils puissent faire des choix raisonnables, donner plus de pouvoir aux organismes de réglementation et mettre en place une approche coordonnée à l’égard des véhicules connectés concordent manifestement avec la façon dont le Commissariat envisage de gérer les problèmes liés au consentement et les défis en matière de protection des renseignements personnels associés aux véhicules connectés.

Je vous remercie, Madame la présidente et les membres du Comité, de m’avoir donné l’occasion de présenter mon point de vue aujourd’hui. Je serai heureux de répondre à vos questions.

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