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Comparution devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne (JUST) concernant Projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois

Le 19 septembre 2017
Ottawa (Ontario)

Déclaration de Daniel Therrien,
Commissaire à la protection de la vie privée du Canada

(Le texte prononcé fait foi)


Introduction

Je vous remercie de m’avoir invité à comparaître devant vous aujourd’hui pour discuter du projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport) et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Je suis accompagné de Patricia Kosseim, avocate générale principale du Commissariat. 

Comme vous le savez peut-être, nous avons comparu devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale (SECU) au sujet d’un projet de loi similaire d’initiative parlementaire (le projet de loi C-226) il y a un an. 

Comme je l’avais alors souligné, je tiens d’emblée à préciser que le Commissariat comprend parfaitement la gravité, l’incidence sociale et les dangers évidents de la conduite avec facultés affaiblies. 

Pour les gouvernements et les organismes d’application de la loi, mettre fin à la conduite avec facultés affaiblies constitue clairement un objectif impérieux de l’État — compte tenu de ses répercussions tragiques sur les Canadiens chaque année. 

Préoccupations préalables

En septembre dernier, lors de notre comparution devant le Comité SECU sur l’autre législation, nous avons alors reconnu l’urgence de l’objectif de l’État, mais avons adressé trois questions à ce dernier touchant les critères de nécessité et de proportionnalité des nouvelles dispositions.

Ces questions incluaient la considération de l’aspect potentiellement intrusif de ce nouveau pouvoir, la mesure dans laquelle il faut s’éloigner de la norme du soupçon, et l’existence de preuves concrètes indiquant dans quelle mesure les changements proposés seraient efficaces.

Dans l’intervalle, depuis notre dernière comparution et introduction de cette nouvelle législation, le gouvernement a publié un énoncé concernant la Charte et un document d’information législatif  dans le but de répondre à ces questions. 

Bien que nous puissions être en désaccord avec certains points précis, par exemple en ce qui concerne les attentes raisonnables en matière de vie privée des personnes qui seraient soumises à un nouveau contrôle routier obligatoire, dans l’ensemble, nous estimons que ces réponses sont satisfaisantes.

Par exemple, ces documents énumérés plus tôt renferment de l’information sur les limites du système en place au Canada. On y explique aussi la façon dont plusieurs autres modèles adoptés ailleurs dans le monde sont parvenus à réduire le nombre d’accidents mortels causés par la conduite avec facultés affaiblies.

Communication des résultats des tests

Cela dit, j’aimerais toutefois soulever d’autres questions importantes liées à la protection de la vie privée, entre autres l’élargissement des fins auxquelles les résultats des tests et les analyses de substances corporelles peuvent être communiqués et la façon dont ces données sensibles seraient traitées. 

L’article 15 (ajoutant un paragraphe 320.36[2] au Code criminel) autorise la communication des résultats de toute évaluation, épreuve de coordination des mouvements ou analyse de substances corporelles en vue de l’exécution ou du contrôle d’application d’une loi fédérale ou provinciale.

À l’heure actuelle, l’utilisation et la communication de ce genre de renseignements ne sont autorisées que dans le cas d’infractions précises au Code criminel, à la Loi sur l’aéronautique et à la Loi sur la sécurité ferroviaire, ou de l’exécution ou du contrôle d’application d’une loi provinciale. 

En conséquence, le projet de loi élargirait les utilisations possibles ou les fins auxquelles ces résultats pourraient être utilisés par les autorités. 

La sécurité routière est certainement un objectif impérieux de l’État, mais nous ne voyons pas en quoi les nombreux autres objectifs d’ordre administratif justifieraient la communication des résultats de tests.

Dans le cadre de votre étude, nous vous recommandons d’examiner de quelles lois il s’agit exactement et d’envisager de limiter la communication à l’exécution de lois ayant des objectifs d’État suffisamment impérieux pour justifier la communication d’information sensible obtenue à l’origine sans motifs. À défaut d’être convaincus, vous pourriez limiter la divulgation sous le régime du paragraphe 320.36[2] aux seules lois, fédérales ou provinciales, relatives è la sécurité des transports.

Conservation des dossiers

Il faudrait aussi se demander si les résultats de tests sont conservés lorsqu’il a été déterminé que les personnes n’ont pas enfreint les limites réglementaires.

La conservation pour un temps indéfini des résultats de test négatifs ou de faux positifs représenterait un risque pour la vie privée. Il faut établir dès le départ des règles de base claires sur leur destruction obligatoire.

Conclusion

Je vous remercie de m’avoir invité à présenter mes commentaires au Comité — et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

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