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Projet de loi C-12, la Loi sur la quarantaine

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Comité permanent de la chambre sur la santé

Le 18 novembre 2004
Ottawa (Ontario)

Allocution prononcée par Raymond D'Aoust
Commissaire adjoint à la protection de la vie privée du Canada


Je vous remercie de m'avoir invité à faire des observations sur le projet de loi C-12, qui abroge et remplace l'actuelle Loi sur la quarantaine.

Nous croyons comprendre que la mise à jour de la Loi sur la quarantaine constitue la première d'une série d'améliorations à l'appui de la santé publique que le gouvernement du Canada entend instaurer. Il s'agit d'un important projet de loi qui vise à prévenir l'introduction et la propagation de maladies transmissibles au Canada.

Nous ne contestons pas le caractère impérieux de la sécurité publique. L'épidémie du SRAS a bien démontré les défis que représente la communication de renseignements personnels pertinents en cas d'incident en rapport avec la santé publique. Santé Canada nous a expliqué à quel point le processus de réception et de communication de renseignements sur les voyageurs qui s'est déroulé pendant cette période a été lourd et long.

Nous sommes également conscients de la menace toujours présente que pose l'utilisation d'agents biologiques à des fins terroristes. Le gouvernement doit être en mesure d'intervenir rapidement si une telle situation devait se présenter.

Toutes ces raisons montrent bien au Commissariat l'importance de la mise à jour de la Loi sur la quarantaine à ce moment.

Dans l'ensemble, nous appuyons le projet de loi, mais nous sommes venus aujourd'hui vous suggérer quelques améliorations.

Avant de commencer, j'aimerais vous expliquer les volets pertinents de l'expertise et du mandat du Commissariat. Nous surveillons le respect de la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui protège les renseignements personnels détenus par plus de 150 ministères, organismes et institutions fédéraux, dont Santé Canada. Les éléments du projet de loi qui intéressent au premier plan le Commissariat sont donc ceux qui se rapportent au traitement des renseignements personnels. Vers la fin de mon exposé, je reviendrai sur la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Si l'on suit l'escalade des procédures décrites dans le projet de loi C-12 qui se rapportent aux contrôles et aux examens médicaux, on constate que la loi permettra la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements médicaux personnels, renseignements qui, dans bien des cas, peuvent être de nature très délicate. Voilà un secteur où nous pouvons faire intervenir notre expertise en matière de traitement des renseignements personnels et à l'égard duquel nous pouvons, je crois, formuler des commentaires qui sauront intéresser le Comité.

Je formulerai à présent des commentaires en détail concernant le projet de loi. Tel que je l'ai mentionné il y un moment, je commencerai par les secteurs rédigés en des termes que nous appuyons, puis je passerai aux dispositions qui gagneraient à être améliorées.

Article 15

Tout d'abord, nous tenons à préciser que nous appuyons le libellé de l'article 15.

Le paragraphe 15(1) proposé stipule que le voyageur est tenu de répondre aux questions posées par l'agent de contrôle ou l'agent de quarantaine et de lui fournir les renseignements et documents en sa possession qu'il peut « valablement exiger dans l'exercice des fonctions que lui confère la présente loi. »

Nous appuyons le principe d'ajouter le caractère valable au devoir de fournir de l'information à l'agent de contrôle ou à l'agent de quarantaine. Il s'agit d'une protection de grand prix pour le voyageur qui, nous l'espérons, continuera de faire partie intégrante du projet de loi.

Notre expérience nous a montré que le critère de la personne raisonnable énoncé dans l'objet de notre loi sur la protection des renseignements personnels qui s'applique au secteur privé, la Loi sur la protection des renseignements personnels et des documents électroniques, est un outil très efficace pour assurer un juste équilibre des intérêts.

Article 54

Le paragraphe 54(1) proposé permet à une personne qui signale une contravention à la Loi de demander de garder l'anonymat, mais le paragraphe 54(2) précise que la promesse de l'anonymat est donnée « sous réserve de toute autre loi fédérale ».

Or, les autres lois fédérales englobent la Loi sur la protection des renseignements personnels. La jurisprudence a établi que l'identité d'une personne qui fait des allégations contre une autre personne peut être connue de cette dernière aux termes de la Loi sur la protection des renseignements personnels, sous réserve de certaine exceptions.

Donc, si la confidentialité devrait représenter la règle générale du projet de loi, il existe des cas où la personne qui présente une demande officielle d'accès en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels a le droit de connaître le nom du délateur. Nous estimons qu'il s'agit d'un juste équilibre qui est conforme aux propositions du projet de loi C-11, la Loi sur la protection des fonctionnaires dénonciateurs d'actes répréhensibles.

Article 2

Aux termes du projet de loi C-12, un contrôle médical s'entend de l'évaluation de l'état de santé du voyageur consistant en un examen de ses antécédents médicaux et de l'historique de ses déplacements ainsi qu'en un examen physique.

Nous sommes d'avis qu'il conviendrait de rétrécir la portée du renvoi aux antécédents médicaux à l'article 2 et de préciser qu'il s'agit des antécédents médicaux « pertinents » de la personne.

Il importe de limiter la collecte des antécédents médicaux du voyageur aux seuls renseignements que l'évaluateur a besoin de savoir pour déterminer si le voyageur présente un risque pour la santé. Cette limite de la collecte est raisonnable, même quand les enjeux sont élevés.

Pour une plus grande clarté et pour des raisons de transparence, nous recommandons également que l'article 2 inclue une définition d'examen médical. Les paramètres de cette définition ne doivent pas être limités, mais la définition devrait déterminer ce qu'on peut inclure, comme la collecte de liquides organiques aux fins de dépistage.

« Motifs raisonnables » de certaines dispositions

Le libellé des articles 56 et 57 semble manquer de symétrie, certains des paragraphes étant fondés sur « l'avis du Ministre » tandis que d'autres supposent la présence de « motifs raisonnables ».

Nous avons constaté que le paragraphe 56(1) proposé répond à une norme moins rigoureuse puisqu'il stipule que le Ministre peut communiquer des renseignements à divers gouvernements ou à un organisme de santé international « s'il estime » que cela est nécessaire, sans qu'une exigence relative au caractère raisonnable de la demande ne vienne tempérer cet avis.

Par contre, le paragraphe 56(2) et l'article 57 proposés exigent tous deux du Ministre qu'il ait « des motifs raisonnables » pour communiquer des renseignements personnels à quiconque faisant partie du secteur des transports ou aux fins des organismes d'application de la loi.

Nous recommandons d'ajouter une norme du caractère raisonnable à toutes ces dispositions.

Protection des renseignements personnels

Notre dernier commentaire porte sur la protection des renseignements personnels assurée par des règlements. L'article 62 dresse la liste de 15 secteurs à l'égard desquels le gouverneur en conseil peut établir des règlements. L'alinéa g) précise que des règlements « concernant la protection des renseignements personnels » peuvent être pris.

Nous avons hâte de travailler avec les représentants de Santé Canada sur ces règlements pour veiller à ce qu'ils améliorent les protections qui sont actuellement offertes aux particuliers par la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Par exemple, toute collecte d'information provenant d'un examen médical devrait être limitée aux fins de la loi.

Il se peut qu'il soit nécessaire d'établir des lignes directrices régissant la communication et la conservation des renseignements personnels.

Pour ce qui est de la communication, nous recommandons que les règlements contiennent des directives que le Ministre serait tenu d'obtenir pour veiller à ce que les renseignements personnels communiqués en application de la Loi soient gardés confidentiels et utilisés aux seules fins prévues par la Loi.

Une des caractéristiques essentielles des pratiques équitables en matière d'information est de veiller à ce que les renseignements personnels communiqués se limitent le plus exactement possible aux fins identifiées. Nous savons également qu'il faut rappeler aux destinataires qu'ils doivent assurer la confidentialité des renseignements reçus, à moins qu'une obligation prévue par la loi ne les contraigne à les communiquer.

La protection de la vie privée repose dans une large mesure sur l'assurance du contrôle sur la manière dont les renseignements personnels sont communiqués et gérés par un tiers qui les a reçus.

Pour ce qui est de la conservation des renseignements personnels, compte tenu du caractère délicat des renseignements personnels susceptibles d'être recueillis aux termes du projet de loi C-12, nous recommandons de ne pas conserver les renseignements plus longtemps que nécessaire.

Mot de la fin

En terminant, nous estimons qu'il s'agit d'un important projet de loi qui, après quelques changements mineurs, arrivera à assurer un juste équilibre entre la protection de la santé publique et le droit à la protection des renseignements personnels des particuliers.

Je vous remercie de m'avoir accordé votre attention aujourd'hui.

Je répondrai volontiers à vos questions sur notre point de vue sur le projet de loi.

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